2021, Vol. 35, No. 1, 40-56

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Revue Française de Gestion Industrielle

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https://doi.org/10.53102/2021.35.01.905

 

Problèmes méthodologiques posés par les systèmes de valorisation dans les modèles économiques de management industriel

 Najat Bara      1, Frédéric Gautier       2, Vincent Giard       3

1 EMINES, UM6P, Maroc Najat.bara@emines.um6p.ma

2 IAE Paris, Université Paris I Panthéon-Sorbonne, gautier.iae@univ-paris1.fr

3 Université Paris-Dauphine, PSL Research University, vincent.giard@dauphine.psl.eu

 

Résumé :

La prise de décision en management industriel fait un appel croissant à des modèles d’optimisation comportant un éclairage économique, et donc privilégiant une performance définie en termes d’efficience. Cet éclairage économique implique le recours à un système de coûts qui doit être compatible avec l’impact dans le temps et dans l’espace des décisions envisagées, en raison de leurs incidences sur le compte de résultat. La comptabilité de gestion est fondée sur un certain nombre d’hypothèses relatives au fonctionnement du système productif qui peuvent être assez éloignées de celles utilisées dans la modélisation décisionnelle. En outre, certains de ces modèles décisionnels utilisent des pénalités qui ne relèvent pas du système comptable. Cet article pointe un ensemble de problèmes méthodologiques induits par l’inadéquation du système de coûts utilisé par de nombreux modèles d’optimisation de management industriel, pouvant conduire à des décisions réputées optimales mais non pertinentes.

Mots clés : Management de la production, Gestion de performance, Recherche opérationnelle, Comptabilité de gestion, Pénalités

 

Methodological problems posed by valuation systems in industrial management models

Abstract

Decision-making in industrial management is increasingly using optimization models with economical lighting, favoring a performance defined in terms of efficiency. This perspective implies using a cost system that must be compatible with the impact in time and space of the proposed decisions because of their impact on the profit and result accounts. Management accounting is based on several assumptions about the operation of the production system that may be quite remote from those used in decision modelling. In addition, some of these decision-making models use penalties that are not part of the accounting system. This article points to a set of methodological problems induced by the inadequacy of the cost system used by many industrial management optimization models, which can lead to decisions deemed optimal but irrelevant.

Keywords : Production management, Performance Management, Operations Research, Management Accounting, Penalties



 

1.     INTRODUCTION

En management industriel, l’analyse de l’impact de décisions s’appuie le plus souvent sur une modélisation physique d’un système de production de produits (terme générique que l’on utilisera ici pour désigner aussi bien des biens que des prestations de service), dont le fonctionnement est affecté par ces décisions à prendre. Ces décisions se décrivent par des variables quantitatives (quantité à commander…) ou des variables qualitatives (itinéraire de transport, configuration d’investissement…) transcrites par des variables binaires dans certaines modélisations. Ces variables, qualifiées de variables de commande, influencent le fonctionnement du système productif étudié par un ensemble de relations causales plus ou moins complexes qui sont au cœur la modélisation retenue. Le niveau de détail du modèle – sa granularité – varie selon que le modèle vise une prise de décisions opérationnelles, tactiques ou stratégiques. Cette granularité et ces relations causales conditionnent la valeur prise par certains paramètres physiques (niveau de stock, kilométrage parcouru…) retenus en raison de leur impact sur la performance du système de production étudié. Ces paramètres sont généralement qualifiés de variables d’état dans les modélisations peu complexes qui mobilisent un nombre restreint de paramètres physiques ; on gardera ici ce vocable, quelle que soit la complexité de la modélisation.

Le modèle décisionnel peut s’appuyer uniquement sur le modèle physique en cherchant à optimiser un indicateur d’efficacité, calculé à partir d’une ou plusieurs variables d’état et, dans certains problèmes décisionnels, de variables de commande binaires. Le plus souvent, cette approche de la performance est considérée comme insuffisante car elle ne tient pas compte du coût des ressources mobilisées pour satisfaire la demande et qu’il existe souvent plusieurs solutions alternatives ayant la même efficacité mais pas le même coût. Cette vision économique de la performance est qualifiée d’efficience et, parmi toutes les solutions ayant la même efficacité, on a intérêt à privilégier la plus efficiente. La détermination de l’efficience d’une solution passe par une valorisation globale d’une solution obtenue dans le modèle physique par un système de coûts fourni par une comptabilité de gestion. Le modèle décisionnel combine alors (voir figure 1) le modèle physique et le modèle comptable pour trouver la solution qui optimise cet indicateur d’efficience, en prenant en compte la disponibilité des ressources et, parfois, certaines contraintes d’efficacité.

Les coûts fournis par la comptabilité reposent implicitement sur une modélisation du fonctionnement du système productif, qui peut être éloignée de celle retenue par le modèle physique pour analyser les conséquences physiques des décisions à prendre. Cette discordance peut invalider la pertinence de la solution retenue.

Par ailleurs, les conséquences de certaines décisions optimales, économiquement fondées, peuvent compromettre les attentes des clients de ce système productif (attentes mesurées par des variables d’état), invalider certaines hypothèses relatives à la demande et remettre en cause la pertinence des décisions proposées par le modèle. Pour éviter cet écueil, certains modèles ajoutent au système de coûts, des pénalités qui ne peuvent pas être tirées de la comptabilité de gestion et qui sont associées à des variables d’état que l’on cherche à « contenir » dans la recherche de l’optimum. Ces pénalités sont des coûts et donc logiquement intégrées dans la partie modélisation économique. Parfois, ces pénalités sont des coûts très faibles permettant de favoriser une solution parmi un ensemble de solutions qui sont équivalentes du point de vue du critère retenu ne prenant pas en compte de ces pénalités.

Nous allons examiner les fondements de ces deux types de modélisation du système physique de production pour faciliter un repérage des causes potentielles d’incohérence.

Pour éviter tout risque de confusion sémantique, on parlera de modélisation décisionnelle et de modélisation économique pour distinguer les deux types de modélisation. La figure 1 illustre les relations entre les deux approches.

Figure 1 : Les composants d’un modèle décisionnel

Cet article poursuit et complète les analyses menées par Giard et Pellegrin (1992) concernant les problèmes méthodologiques posés par les systèmes de valorisation dans les modèles économiques de management industriel. Il ne mobilise pas d’articles traitant de problèmes méthodologiques posés par les systèmes de valorisation économique dans les modèles de décision en management industriel, car rares sont les articles détaillant les principes de valorisation économique retenus (à l’exception notable de Creazza et al. (2012) dont le modèle de configuration d’un réseau de distribution est complété d’une explicitation des fonctions de coûts utilisées). Il propose une synthèse d’idées présentées dans plusieurs articles et communications que nous avons effectués ces dernières années (principalement : Giard & Pellegrin, 1992 ; Giard, 2017 ; Bara et al. 2020a, 2020b). Cette réflexion se fonde sur une analyse d’écrits existants (ouvrage, articles) qui traitent de décisions en management industriel, s’appuyant sur un éclairage économique et qui sont représentatifs d’une littérature largement exploitée dans l’enseignement supérieur.

On commencera (section 2) par une caractérisation des représentations physiques des modélisations décisionnelles et économiques. Les implications de ces remarques méthodologiques diffèrent selon que dans le système de valorisation de la modélisation décisionnelle, on est en présence (voir Figure 1) de coûts (section 3) ou de pénalités (section 4). Une rapide conclusion sera présentée en section 5.

2.     Caractérisation des représentations physiques des modélisations décisionnelles et économiques

On commencera par examiner les principales caractéristiques du modèle physique utilisé par le modèle décisionnel pour prendre des décisions (§2.1), avant d’examiner rapidement les bases du système de coûts offert par la modélisation économique – principalement la comptabilité de gestion – que le modèle décisionnel combine avec le modèle physique pour proposer la solution la plus efficiente (§2.2).

2.1    Modélisation des processus sous-jacente dans la modélisation décisionnelle

Une modélisation décisionnelle se caractérise principalement par la combinaison de trois caractéristiques : le degré de certitude des informations mobilisées, la réalité du système étudié et la granularité spatiotemporelle retenue.

2.1.1  Modélisation en univers certain ou aléatoire

Les caractéristiques du système productif et de son environnement sont considérées comme connues avec certitude ̶ et le problème décisionnel se pose en univers certain ̶ ou non. Le plus souvent, dans ce dernier cas, ces caractéristiques sont supposées être connues en probabilité ; on n’évoquera pas ici le cas de l’univers incertain parce qu’il fait généralement l’objet de traitements spécifiques dans lesquels l’optimisation joue un rôle mineur. Cette caractérisation a un impact sur les techniques de modélisation utilisables. Dans la modélisation en univers aléatoire, les variables d’état deviennent aléatoires. Cette caractéristique conduit à travailler en espérance mathématique dans le cadre de modèles analytiques pour les systèmes fictifs très simples, s’intéressant à des décisions de routines (exemple, gestion des stocks), prises dans un cadre décisionnel doté d’une certaine stabilité. Dans les cas plus complexes, l’approche de Monte Carlo est utilisée dans une modélisation sur un tableur ou sur un simulateur de processus. En univers certain, la programmation mathématique est bien adaptée à la formalisation de problèmes où les relations causales sont simples, la modélisation via un tableur s’imposant dans les autres cas.

2.1.2  Système productif réel ou fictif

La littérature de la recherche opérationnelle privilégie des systèmes fictifs relativement simples pour établir la solution analytique caractérisant la solution optimale d’un problème décisionnel-type (par exemple, gestion d’approvisionnement). Les systèmes fictifs peuvent être plus complexes et posséder un dimensionnement variable conduisant à une modélisation générique du problème posé (par exemple, détermination d’une tournée de transport) le plus souvent par la programmation mathématique ou la théorie des graphes et, dans certains cas, conduire à une proposition d’algorithme de résolution spécifique.

Un certain nombre de recherches, conduites dans le cadre de contrats industriels, s’intéressent à une problématique décisionnelle se posant pour un système productif réel. Dans ce cas, la modélisation peut conduire à l’évaluation de scénarios décisionnels (what-if analysis), à la formulation d’un problème d’optimisation si la complexité est très réduite, à la formulation d’un modèle de simulation ou à un système d’aide à la décision combinant la logique de scénarios avec des optimisations locales et/ou de la simulation.

La démarche proposée est souvent suffisamment générique pour être transposable à des systèmes productifs de caractéristiques similaires confrontés aux mêmes problèmes décisionnels, ce qui atténue la frontière entre fictif et réel.

2.1.3  Granularité du modèle

La granularité retenue dans la modélisation, dans ses dimensions spatiales et temporelles, est un élément important de caractérisation de la modélisation décisionnelle. Le temps intervient sous plusieurs aspects : modélisation mono ou multipériode, amplitude de la période et horizon retenu dans le cas multipériode. La granularité comporte aussi une caractérisation spatiale, avec le niveau de détail (ou d’agrégation) des ressources et des produits. La granularité dépend souvent du périmètre du système étudié : en règle générale, la granularité est fine dans l’analyse des décisions opérationnelle (périmètre de modélisation restreint) et plus agrégée dans les autres, à ceci près que beaucoup de décisions stratégiques impliquent de travailler également avec une modélisation fine pour s’assurer de la robustesse de la solution obtenue avec une modélisation agrégée.

2.2    Modélisation implicite des processus sous-jacente dans la modélisation économique

La comptabilité générale a pour objet de rapprocher les flux physiques et financiers observés dans une entreprise pour permettre d’évaluer périodiquement le résultat de son activité et la valeur de son patrimoine. Cette évaluation doit respecter un ensemble de règlements définissant les modalités de rattachement de certaines dépenses à la période de référence (exercice comptable), ce qui a un impact sur la valeur patrimoniale de l’entreprise (bilan). Ces informations sont à usage externe (administration fiscale, clients, fournisseurs, actionnaires…) et interne (résultat disponible, dettes, créances…). Ce traitement comptable mobilise un ensemble de conventions pour répartir dans le temps les dépenses d’investissement (amortissement) et rattacher à un exercice, des flux financiers de produits achetés ou vendus pendant un autre exercice. Les dépenses peuvent être regroupées par nature (matières premières…) et par fonction (ventes, administration…)

La comptabilité de gestion (au sens large car plusieurs approches sont utilisables) retraite les informations de la comptabilité générale pour mesurer le coût de fonctionnement d’une entité (service, usine…), le coût de production d’une prestation interne (envoi d’un conteneur) et le coût de fabrication d’un produit. Elle a pour objectif d’aider au contrôle. L’établissement de ces coûts pose deux problèmes méthodologiques majeurs ; on se focalisera sur le coût d’un produit mais ces problèmes se posent également pour le coût d’un service.

2.2.1  Problème de l’affectation des charges indirectes

Le premier problème est celui de l’affectation de charges indirectes aux produits ou entités. Les charges indirectes correspondent à des prestations ou des inputs partagés par plusieurs produits (dépenses énergétiques d’un atelier ne disposant que d’un compteur unique, frais généraux…) et peuvent (ou non) être réparties entre ces produits. Le caractère direct ou non d’une charge est étroitement lié à l’organisation du système productif. La distinction entre coût direct et indirect d’un produit dépend du niveau d’agrégation retenu : une charge peut être indirecte au niveau d’une référence élémentaire de produit et devenir directe si l’on raisonne au niveau d’une famille de produits ou d’un ensemble de produits fabriqués dans un même site. Par ailleurs, on est souvent amené à travailler par famille de produits, les produits d’une famille mobilisant les mêmes ressources. Le calcul du coût direct d’un produit fictif représentant une famille est nécessairement un coût moyen pondéré des coûts directs des références de cette famille, où les coefficients de pondération correspondent à une structure moyenne dont la stabilité n’est pas garantie.

2.2.2  Problème des inducteurs d’activité

Depuis plus de deux décennies, la comptabilité par activité s’est imposée comme une démarche de base en comptabilité de gestion (Kaplan & Cooper, 1998), parce qu’elle permet de diminuer l’arbitraire du traitement des coûts indirects (Johnson & Kaplan, 1987; Lebas, 1992). Son fondement est de remplacer la relation causale directe « les produits consomment les ressources », par la relation causale indirecte « les produits consomment les activités qui consomment les ressources » afin de rétablir l’homogénéité dans les regroupements de charges indirectes. Cette approche est fondée sur l’identification des activités et des inducteurs d’activité. Le concept d’activité est large et ne se focalise pas sur la seule production d’un produit ; elle peut correspondre, par exemple à un lancement d’une série en production. Un inducteur d’activité et l’élément déclencheur ou générateur de l’exécution de l’activité (Barth et al., 2008). La comptabilité par activité englobe les autres approches de la comptabilité de gestion qui peuvent s’en déduire ; c’est la raison pour laquelle elle est privilégiée ici. Cette démarche, qui met l’accent sur des inducteurs d’activité (Kaplan & Cooper, 1998), permet une définition plus pertinente des coûts utilisés en modélisation décisionnelle, lorsque les coûts d’activités sont strictement proportionnels aux volumes d’inducteurs d’activités (Noreen, 1991).

2.2.3  Problème de l’impact du niveau d’activité

Se pose ensuite le problème de l’impact du niveau d’activité sur le calcul de ces coûts aussi bien pour les charges directes que pour les charges indirectes (amortissement d’une machine dédiée à une production). On peut partir du niveau d’activité constaté -avec l’inconvénient de rendre difficiles des comparaisons dans le temps et dans l’espace -ou choisir de fonder ces calculs sur un niveau d’activité « normal ». Cette dernière solution, généralement retenue, facilite les comparaisons dans le temps (et dans l’espace) mais soulève deux difficultés. Il ne peut exister de définition objective de ce niveau, ce qui est une source possible de contestations, voire de malversations. La discordance entre le niveau d’activité observé et celui considéré comme normal pose nécessairement un problème de cohérence entre la comptabilité générale et la comptabilité de gestion, la somme des coûts imputés de cette dernière pouvant être assez différente de celle des charges de la comptabilité générale.

Plusieurs solutions existent pour répondre à ces problèmes et permettre le calcul d’un coût partiel ou d’un coût complet. Il n’est pas nécessaire ici de les examiner, ce qui importe c’est la mise en évidence du fait que le coût que l’on utilise dans un système de valorisation est le résultat d’une modélisation du fonctionnement d’un système productif dans laquelle il est fait usage de conventions sur la répartition dans le temps de certaines charges, de conventions sur le niveau d’activité de ce système productif et de conventions sur une éventuelle répartition de certaines charges indirectes reposant sur des relations causales parfois contestables.

Ces coûts sont établis pour être utilisés principalement en contrôle de gestion ; ils ne peuvent l’être sans précaution pour la prise de décisions en management industriel. Dans ce contexte, quelques considérations additionnelles doivent être prises en compte pour définir, à partir des informations fournies par la comptabilité de gestion, des coûts qui soient pertinents dans la perspective décisionnelle retenue. Le principe conducteur est que le système de valorisation doit être tel que les avantages de la décision proposée, par rapport à une décision de référence (qui peut être de ne rien faire), puissent être observables sur les résultats financiers de l’organisation concernée. À cet effet, quelques considérations additionnelles doivent être prises en compte, pour définir un système de coûts pertinent pour l’évaluation des décisions prises en management industriel.

˗  La comptabilité de gestion est orientée vers la détermination de coûts d’un produit (au sens large, rappelons-le). Un problème décisionnel se pose plutôt en termes de coût d’une décision en comparaison avec une décision de référence (définie par les valeurs retenues pour les variables de commande), pas toujours explicitée. La solution analytique optimale d’un système fictif (règles d’approvisionnement, par exemple) ne considère pas de solution de référence. L’application de cette relation à un cas réel pour améliorer une décision récurrente, fait appel à un système de coûts dont l’intérêt n’est pas seulement de pouvoir déterminer les variables de commande mais aussi de mesurer le gain obtenu en passant de la solution courante à la solution optimale ; ce gain a pour vocation à se retrouver dans le compte de résultat, faute de quoi cette optimisation est vide de sens. Dans le cas de systèmes réels, une alternative décisionnelle (portant sur un ensemble de variables de commande) s’évalue nécessairement en rapport avec une solution décisionnelle de référence qui peut être de ne rien faire (extension d’usine, par exemple) ou de reconduire l’existant à l’identique (remplacement d’une machine, par exemple). Cette analyse économique comparative porte le nom de bilan différentiel (coût différentiel proposé par les comptables pour l’analyse des décisions, - Clark, 1923) et permet d’éliminer toutes les charges inchangées, quelle que soit l’alternative décisionnelle étudiée (Bara et al., 2020b). Certaines décisions ont un impact sur les recettes ; on ne traitera pas cet aspect ici car il est évident à prendre en compte dans un bilan différentiel.

˗  La comptabilité de gestion propose, dans cette perspective de contrôle de gestion, des objets de coûts (produits ou entités organisationnelles) qui peuvent être éloignés des besoins de l’évaluation dans les modèles décisionnels. Les fonctions de coût liées aux variables de décision peuvent ne pas être identifiées dans le système de comptabilité de gestion. Ce constat conduit à vérifier, sur le plan méthodologique, que les fonctions de coûts utilisées ne sont pas trop éloignées de la maille d’analyse retenue par le système de comptabilité de gestion.

˗  Les économistes ont introduit très tôt la distinction entre coût fixe et coût variable, le coût fixe étant indépendant du volume de production. Ce concept est intéressant dans l’analyse décisionnelle, dès lors que l’on introduit explicitement l’horizon de temps retenu dans la prise de décision et qu’on le généralise à d’autres décisions que celles de la production.

˗  Les alternatives décisionnelles étudiées peuvent avoir un impact sur plusieurs périodes, ce qui conduit à utiliser l’actualisation pour synthétiser les variations de flux de trésorerie calculées dans le bilan différentiel pour travailler sur des VAN (Valeur Actuelle Nette) ou des annuités constantes équivalentes.

Ajoutons enfin que les inducteurs d’activités dépendent du niveau décisionnel retenu (opérationnel, tactique ou stratégique) et que leur capacité d’estimation des coûts est d’autant plus grande que la granularité du modèle est fine, sur une perspective temporelle courte. Les coûts des inducteurs d’activités sont fortement influencés par les choix stratégiques et organisationnels et leur valeur susceptible d’évoluer suivant les inducteurs de coûts (Shank & Govindajaran). Il en est généralement de même pour les pénalités. La figure 2 illustre ces remarques.

 

Figure 2 : Impact du niveau décisionnel

3.     Problèmes méthodologiques posés par l’usage des coûts dans la modélisation décisionnelle

Certains modèles utilisent des coûts du marché (par exemple, prix d’achat variable en fonction des quantités achetées), qui sont difficilement contestables. Ces modèles intègrent également d’autres coûts (de commande, de possession…) qui eux posent quelques problèmes comme nous allons le voir.

Certains coûts tirés de la comptabilité de gestion sont utilisables par la modélisation décisionnelle si la représentation du fonctionnement du système productif de cette modélisation décisionnelle est peu différente de celle retenue par la modélisation économique servant de base à la détermination de ces coûts. Ce problème de cohérence est généralement négligé dans la littérature. Il n’est pas possible ici d’effectuer un balayage très large des implications de ces remarques méthodologiques, aussi a-t-on choisi d’illustrer certaines d’entre elles sur quelques cas considérés comme représentatifs.

Les modélisations génériques évoquées ici (univers aléatoire et univers certain) sont décrites en détail dans quelques manuels assez complets sur cette problématique du génie industriel (par exemple, Giard, 2003 ; Silver et al., 1998 ; Hax et Candea, 1984). On peut noter que, souvent, ces manuels éludent la question de la détermination des coûts utilisés par ces modèles. Il convient de distinguer les modèles génériques qui fournissent une solution analytique au problème posé, des modèles génériques trop complexes pour obtenir une solution analytique mais dont la solution optimale, pour une instance de problème peut être trouvée à l’aide d’approches classiques, en particulier d’optimisation.

Au préalable, il faut souligner que ces problèmes surgissent lors de l’utilisation concrète de relations analytiques de modèles décisionnels portant sur systèmes fictifs, ou lors de l’instanciation d’un modèle générique sans solution analytique. En effet, tant que l’on reste au niveau abstrait de la modélisation, ces modèles ont une cohérence interne difficilement contestable.

Nous examinerons d’abord les problèmes posés par l’instanciation des coûts dans les modèles génériques avec solution analytique (§3.1), puis ceux rencontrés dans les modèles génériques sans solution analytique et les modèles portant sur des systèmes productifs réels (§3.2). Nous verrons ensuite un problème spécifique de détermination de coûts rencontré dans la modélisation de certaines décisions stratégiques (§3.3).

3.1    Problèmes posés par l’instanciation des coûts dans les modèles génériques avec solution analytique

On illustrera notre propos en nous appuyant sur le problème de gestion des approvisionnements qui mobilise classiquement des coûts unitaires de commande, de possession et de rupture. Ces modèles reposent tous implicitement sur l’hypothèse d’indépendance entre les solutions qu’ils préconisent et les paramètres physiques et coûts qu’ils utilisent, ce qui peut être fort contestable, comme nous allons le montrer.

3.1.1  Problèmes posés par l’instanciation des coûts de commande

Dans la version déterministe du modèle de base (modèle de Wilson), les variables de commande sont la quantité commandée et le point de commande et les variables d’état sont : le nombre moyen annuel de commandes et le stock moyen. Dans sa version stochastique, les moyennes sont à remplacer par des espérances mathématiques (et il faut ajouter la variable d’état « espérance mathématique de la rupture de stock »). La solution analytique optimale fait intervenir les coûts unitaires associés aux variables d’état qui correspondent à des inducteurs d’activité. Dans une perspective de bilan différentiel, la solution de référence est la solution actuelle que le produit existe ou non. L’application de ces relations analytiques dans la résolution de problèmes concrets oblige à spécifier correctement le contenu de ces coûts unitaires, pour que les gains théoriques, obtenus en passant de la solution courante à la solution optimisée, se retrouvent dans le compte de résultat.

Prenons l’exemple d’un service centralisé de gestion de commandes (Giard et Pellegrin 1992). La commande passée est un inducteur d’activité. Le coût comporte un coût variable direct c (papier, affranchissement…) et une quote-part du coût annuel K de fonctionnement de ce service qui est un coût indirect. Si ce service traite n commandes par an (pour simplifier, on considère ici qu’il s’agit du niveau d’activité normal), le coût standard de gestion d’une commande est K/n, ce qui conduit au coût de commande unitaire c+K/n et au coût partiel annuel de commande n(c+K/n)= n.c+K. Si la politique optimale d’approvisionnement conduit à diminuer de 20 % le nombre de commandes, le nouveau coût partiel annuel de commande n’est égal à 0,8.n(c+K/n) qu’à la condition expresse de pouvoir réaffecter rapidement 20 % des ressources à l’origine du coût indirect K et rendre ainsi ce coût indirect variable. Si tel n’est pas le cas, l’économie réalisée n’est que de 0,8.n.c et le coût de commande unitaire de cette nouvelle solution est c+K/(n.0,8) , valeur qui conduit à une solution optimale différente. Si au lieu d’une diminution du nombre annuel de commandes, le passage à l’optimum conduit à une augmentation de ce nombre, se pose alors le problème de l’insuffisance de capacité du service gestionnaire des commandes, qui doit s’adapter à cet accroissement de charge.

3.1.2  Problèmes posés par l’instanciation des coûts de possession

Le nombre moyen d’unités en stock est un inducteur d’activité qui intervient de deux façons, générant deux composantes de ce coût unitaire.

˗  Pour une entreprise, une variation de la valeur de ses stocks se traduit par une variation de son besoin en fonds de roulement ou, en l’absence de financement bancaire de ces actifs, par une variation de ses possibilités de placements à court terme. Cet inducteur génère un coût variable direct c’ correspondant à un coût d’opportunité, proportionnel à la valeur du produit stocké et à un taux d’intérêt.

˗  Ce stockage conduit également à supporter le coût annuel K’ (location de locaux, assurance, gardiennage, énergie, etc.) correspondant à un coût indirect que l’on peut, là encore, standardiser sur une base volumique. La définition de la capacité volumique Q de l’entrepôt est délicate car elle dépend du niveau d’activité normal et de la plus ou moins grande compensation, à chaque instant, entre les niveaux hauts et bas des stocks des références stockées. Si la solution courante conduit à utiliser le volume q de l’entrepôt, le coût de possession doit inclure en plus un coût de stockage K’(q/Q), ce qui conduit au coût de possession unitaire c’+ K’(q/Q) . La variation de la capacité moyenne utilisée, consécutive au passage à la solution optimale, devrait induire, en cas de baisse du niveau de stock, à une diminution de la capacité nominale de l’entrepôt et donc à une augmentation du coût unitaire de stockage (sinon la somme des contributions en provenance des références stockées ne couvre pas le coût annuel  K’) et, dans le cas contraire, à une augmentation de la capacité volumique Q de l’entrepôt, ce qui conduit également à une majoration de ce coût unitaire de stockage.

Comme précédemment, la modification de la variable d’état « stock moyen » induite par le passage de la solution courante à la solution optimale se traduit par une variation immédiate du coût variable direct mais pose un problème similaire à celui rencontré par la standardisation du coût indirect intégré dans le coût de commande.

Ces difficultés peuvent conduire à préférer l’utilisation de modèles d’approvisionnement pour un ensemble de références, sous contrainte de respect d’une contrainte de capacité (nombre maximal de commandes gérées par le service, stock moyen cumulé maximal). Cette approche, mobilisable aussi bien en univers certain qu’en univers aléatoire, conduit à des solutions analytiques dans lesquelles le multiplicateur de Lagrange associé à une contrainte s’interprète comme le coût marginal de variation de cette contrainte (Giard, 2003), et lui donne un statut de coût (voir §3.3) objectivement fondé.

La hiérarchie décisionnelle conduit à ce que le dimensionnement de certaines ressources soit une variable de commande au niveau stratégique et devient une contrainte pour les décisions tactiques et opérationnelles, les inducteurs de coûts n’étant plus les mêmes (voir Figure 2).

3.1.3  Problèmes posés par l’instanciation des coûts de rupture

Dans les modélisations génériques en univers aléatoire, les ruptures de stock sont prises en compte de deux façons. On peut conserver une modélisation n’intégrant que des coûts de commande et de possession mais en ajoutant une contrainte sur un niveau de la rupture de stock, ce qui conduit à des formulations analytiques complexes mais utilisables. Autrement, il faut intégrer un coût de rupture dans la fonction de coût à minimiser.

Le problème ne se pose pas de la même façon selon que le client est une entreprise ou un particulier et que la demande est perdue ou différée.

Coût de rupture d’une demande différée

Le coût d’une demande différée correspond généralement à un coût administratif standardisé, calculé comme une quote-part d’un coût fixe indirect, ce qui pose les problèmes méthodologiques évoqués au §3.1.

Dans le cas d’un client industriel, cette rupture peut entraîner un arrêt de la production. Les conséquences financières sont très difficiles à mesurer, d’autant qu’elles dépendent de la durée de cette rupture de stock. L’estimation de la distribution de probabilités de cette durée, utilisée par certains modèles analytiques et conduisant à des solutions analytiques complexes à mettre en œuvre, est fortement sujette à caution alors qu’elle a un fort impact sur la mise en œuvre des solutions optimales.

On constate que dans certains secteurs où la demande de certains composants est aléatoire (composants alternatifs d’un véhicule automobile, par exemple), les perturbations induites par la rupture de stock sont telles qu’il est fait appel à des procédures d’approvisionnement en urgence permettant d’éviter une rupture prévisible à brève échéance. Les unités manquantes peuvent être acheminées par un affrètement exceptionnel dédié (avion, camion), générant un coût fixe indépendant du remplissage. Elles peuvent être également confiées à un opérateur de messagerie qui facture ses prestations à l’unité, ce qui conduit à un coût variable direct. Ces modélisations conduisent à des solutions analytiques qui définissent les stocks de sécurité optimaux et qui permettent, en cas de rupture de stock, de choisir le transport d’urgence le plus intéressant en fonction de la structure de coûts et de la dispersion de la demande (Sali et Giard, 2015).

Coût de rupture d’une demande perdue

Lorsque la demande émane d’individus et non d’entreprise, la demande est généralement peu susceptible d’être différée pour des articles de forte consommation. Dans ce cas, la rupture peut simplement conduire à l’acquisition, par le client, d’un produit similaire d’une autre marque, ce qui n’a pas d’impact notable. La vente peut être perdue, auquel cas la rupture induit un manque à gagner correspondant à la marge unitaire réalisée sur cet article, ce qui correspond à un coût d’opportunité (ce qu’illustre bien le modèle classique du « marchand de journaux »). Mais les conséquences peuvent être plus graves si le client décide de quitter le magasin sans effectuer ses autres achats. La répétition de ce genre d’incidents, pour un client régulier, peut l’amener à cesser de fréquenter ce magasin. L’adjonction d’une pénalité arbitraire (voir §4.1.1) est possible, pour limiter le risque de rupture de stock mais on voit bien ici difficulté qu’il y a à déterminer une pénalité « incontestable ». Ceci conduit souvent à préférer une définition de la politique d’approvisionnement intégrant la rupture de stock sous la forme d’une contrainte de pourcentage maximal de demandes non satisfaites.

3.2    Coûts utilisés par les modèles génériques sans solution analytique et les modèles de systèmes productifs réels

Ces modèles s’intéressent à des décisions complexes de pilotage faisant intervenir des coûts de fonctionnement d’un système productif, généralement fictif (mais pas toujours) et en univers certain, en s’appuyant le plus souvent sur la programmation mathématique. Nous allons prendre appui sur deux exemples pour examiner quelques écueils à éviter, sans prétention d’exhaustivité.

Dans la détermination périodique de tournées de transport, les premières modélisations s’appuyaient principalement sur un critère de temps ou de distance, le coût de la solution proposée dépendant fortement de ces paramètres. La complexité des problèmes à traiter et l’accroissement de la performance des ordinateurs et des solveurs ont conduit à privilégier le coût de la solution. Le coût unitaire associé à l’inducteur « distance parcourue » intègre naturellement des dépenses d’essence et une quote-part de dépenses de révision périodique. Si la modélisation retenue interdit les solutions mobilisant des heures supplémentaires, la prise de décision opérationnelle étudiée n’a pas d’influence sur la rémunération des chauffeurs qui constitue une charge fixe sur le court terme. Dans le cas contraire, le coût de ces heures complémentaire constitue un coût variable direct d’un inducteur « dépassement horaire ». Le problème de la prise en compte d’une quote-part de l’amortissement des véhicules (ou d’une valeur de remplacement) doit s’aborder en tenant compte du fait que la solution obtenue est sans incidence sur l’amortissement fiscal qui doit être considéré comme un coût indirect fixe, ce qui doit conduire à ne pas en tenir compte. Si les tournées mobilisent un parc hétérogène de camions (en termes de capacité, de performance…), la capacité de transport peut être excessive à certains moments et comporter la sélection des camions à utiliser. Le problème de la prise en compte de l’amortissement semble alors se poser de manière accrue mais il faut garder à l’esprit que le dimensionnement de ce parc est une décision stratégique évaluée en prenant en compte d’autres données comme les fluctuations de la demande et qui encadre le problème de tournées (hiérarchie décisionnelle rappelée ci-dessus) ; dans ces conditions, il semble préférable de ne pas tenir compte de cette composante de coût dans la prise de décisions opérationnelles.

Dans beaucoup de problèmes d’ordonnancement de commandes dans un système de production, le critère du temps est suffisant. Il ne l’est plus lorsque varie, selon l’ordonnancement retenu, la consommation de certaines matières (fluides, énergie…) et les ressources en personnel mobilisées (heures supplémentaires, renforts). La disponibilité des équipements ne dépendant pas de la décision d’ordonnancement, il semble préférable, comme discuté ci-dessus, de ne pas tenir compte de ces charges fixes sur le court terme (Giard, 1993). Prenons l’exemple d’un problème d’ordonnancement de produits complexes à assembler sur une ligne d’assemblage. Leur variété s’obtient par une combinatoire de composants optionnels dont certains ont un impact sur le temps passé sur certains postes de la ligne, ce qui conduit à tenir compte, dans l’ordonnancement, de contraintes d’espacement entre produits ayant certaines caractéristiques. Ces contraintes peuvent être allégées en mobilisant ponctuellement (pendant un cycle) un renfort sur le poste de la ligne connaissant la surcharge de travail induite par l’ordonnancement. En pratique, cet opérateur ne peut être embauché pour ce seul renfort ponctuel, il le sera nécessairement pour une durée plus longue (généralement le temps de présence de l’équipe travaillant sur la ligne). L’utilisation d’un coût-standard calculé comme le quotient d’un coût indirect fixe (celui de son embauche pour rejoindre l’équipe) par son temps de présence mesuré en nombre de cycles est une solution classique dans la littérature, qui considère que l’inducteur de coût est l’utilisation ponctuelle d’un renfort. Cette interprétation n’est pas correcte pour deux raisons. S’il est fait appel à une seule minute de renfort pendant une journée, le compte de résultat de l’entreprise enregistrera la dépense totale induite par la présence de ce renfort. En outre, un opérateur appelé en renfort est mobilisable plusieurs fois pendant son séjour sur la ligne, ce qui accroît considérablement le nombre d’ordonnancements respectant les contraintes d’espacement. Cet accroissement présente un intérêt si l’ordonnancement a un impact sur certains coûts variables ; par exemple, il peut diminuer le nombre de purges de pistolets de peinture liées au changement de couleur de produits se succédant dans une cabine de peinture (Giard & Jeunet, 2010) ; c’est le cas également, si une partie du processus peut s’effectuer sur un processeur d’un ensemble de processeurs parallèles hétérogènes.

3.3    Problèmes spécifiques posés par le design d’un système productif

Ce type de décision stratégique, impliquant toujours des investissements, peut s’aborder dans le cadre d’une approche comparative de scénarios ou celle d’un modèle d’optimisation. Dans les deux cas, peuvent se poser deux problèmes méthodologiques.

3.3.1  Le problème posé par l’actualisation

Les décisions stratégiques impliquent le plus souvent des investissements utilisés sur plusieurs années. La sommation directe des flux de trésorerie (FT) sur ces années en incluant les montants investis n’est pas correcte, il faut faire intervenir les mécanismes de l’actualisation et calculer la VAN du scénario étudié. Se pose alors le double problème de la définition du taux d’actualisation et de l’horizon économique considéré, ces deux paramètres ayant une grande influence sur le calcul de la VAN.

Ces considérations sont souvent négligées au profit d’une analyse effectuée sur une année « moyenne » incluant un amortissement des équipements dont la méthode de calcul n’est généralement pas précisée.

Cette démarche est acceptable si les FT résultant de l’exploitation de ces nouveaux équipements sont assez stables au fil des années et si l’amortissement utilisé n’est pas un amortissement fiscal mais un amortissement économique, c’est-à-dire une valeur calculée comme l’annuité constante équivalente aux montants investis sur l’horizon économique considéré (Boiteux 1963 ; Gautier & Giard 2000) Force est de constater que ces précautions méthodologiques sont généralement négligées.

3.3.2  Problème posé par l’invalidation d’hypothèses initiales du modèle par la solution optimale trouvée.

Le problème évoqué au § 3.1.1 sur l’invalidation possible de l’usage de la formule de la quantité économique de commande, en raison d’une différence forte entre la modélisation physique sous-jacente dans les calculs de coûts et celle qui résulte de l’application de la solution optimale se retrouve ici, mais à un degré beaucoup plus important.

Nous nous appuyons sur l’exemple de la création ou de la modification d’un réseau logistique, en soulignant que les problèmes méthodologiques rencontrés sont très généraux.

L’établissement d’un scénario implique une vision assez fine du fonctionnement du nouveau système productif. La capacité d’un hub de fret aérien dépend de ses ressources matérielles (entrepôts, engins de manutention…) et humaines, de leurs règles de gestion (règles d’allocation des marchandises, organisation du travail…) mais aussi de l’organisation des transports entrants et sortants (fréquences, capacité des avions…) car, toutes choses égales par ailleurs, une diminution de la fréquence des mouvements d’avions, compensée par une augmentation de leurs capacités, peut induire des dysfonctionnements liés à une insuffisance de capacité de stockage dans les aéroports. L’étendue du réseau mis à disposition des clients a un impact sur son attractivité et donc sur la demande de transport et la rentabilité des acteurs qui gèrent ce réseau. Pour un scénario donné, on peut définir des inducteurs de coûts assez macroscopiques, et déterminer des coûts indirects fixes et des coûts variables directs valables sous certaines conditions. L'analyse d’un scénario alternatif conduit à se poser les mêmes questions et conduire à d’autres hypothèses de trafic, de ressources mobilisées, de règles de gestion et, au final, des inducteurs et des coûts qui peuvent être différents. La légitimité du bilan différentiel comparant plusieurs scénarios à un scénario de référence se fonde sur la cohérence des hypothèses physiques de chacun d’entre eux.

Il est tentant de chercher une formulation générique de ce problème de design de réseau logistique et c'est l'approche retenue par la très grande majorité des chercheurs. Dans ce contexte, on part implicitement d’un scénario de base permettant de définir des demandes de transport, des capacités de hubs, des coûts, etc. Le problème est que le résultat de l’optimisation peut conduire à retenir une situation très différente de celle du scénario de base, ce qui invalide le système de coûts utilisé. Cet aspect est généralement négligé dans des écrits qui s’attachent plus à la complexité d’une modélisation et/ou à des temps de résolution.

4.     Problèmes méthodologiques posés par l’usage de pénalités dans la modélisation décisionnelle

On a déjà évoqué (§3.1) l’usage de pénalités dans le cas d’une rétroaction forte de la solution trouvée sur les paramètres du modèle économique. Nous allons creuser ce point (§4.1) (Bara et al. 2020a) avant d’aborder un usage particulier des pénalités, introduire un critère additionnel d’efficacité sans impact sur l’efficience optimale trouvée (§4.2).

4.1    Impact de la non-satisfaction de toutes les demandes

La demande exprimée sur la période retenue par le modèle décisionnel peut ne pas pouvoir être satisfaite en totalité. Ce cas de figure est pris en compte dans la modélisation de systèmes fictifs conduisant à des solutions analytiques prenant en compte un éclairage économique, principalement dans un contexte stochastique défini en régime de croisière. Dans ce type de modèle, l’arbitrage économique conduit à accepter de ne pas satisfaire toutes les demandes. Deux cas de figure, fondés sur le type de client du système étudié, le client final (B2C) ou un autre système productif (B2B), doivent être distingués pour comprendre les conséquences d’une défaillance et donc le type de pénalité à mettre en œuvre.

4.1.1  Système productif de type B2C

Le système étudié vend des produits directement utilisés par le client final. Deux cas de figure doivent être distingués, selon que ce produit est personnalisé ou non.

Dans le premier cas (prestation de transport avec réservation, série limitée…), une pénalité est versée aux clients si le contrat ne peut être honoré. Le yield management illustre bien cette situation pour laquelle plusieurs modèles existent pour déterminer le nombre optimal de places à vendre en surréservation. Dans ce cadre, la détermination de la pénalité contractuelle à verser aux clients acceptant de renoncer à la prestation achetée est une affaire de « perception des comportements » par les spécialistes du yield et peut difficilement être fondée rationnellement en raison de la multiplicité des contextes de défaillance, cette détermination pouvant toutefois être définie par une norme réglementaire (c’est le cas de l’UE).

Le système peut vendre à des clients un produit banalisé (par exemple, quotidiens, bouteilles d’eau), dont la demande est définie sur une période séparant deux réapprovisionnements.

˗  Le critère économique est logiquement celui de la maximisation de l’espérance mathématique de la marge, qui fait intervenir le produit de l’espérance mathématique de la demande satisfaite par le prix de vente, diminué de l’espérance mathématique du coût des invendus au cours de la période. Si le prix de vente n’est pas sujet à des variations, on utilise alors une approche équivalente de minimisation d’une espérance de coûts dans laquelle intervient le produit de l’espérance mathématique de la rupture de stock, par un coût de rupture. Dans le cas de demandes non satisfaites perdues, ce coût de rupture est généralement la marge unitaire procurée par la vente du produit, ce qui correspond à un coût d’opportunité. On augmente parfois ce coût de rupture d’une pénalité arbitraire si les données du problème conduisent à une probabilité de rupture trop importante, pouvant remettre en cause les caractéristiques de la demande (voir §3.1.3). On notera que ce type d’approche tient difficilement compte des reports possibles de la demande sur des produits substituables. Dans le cas d’une demande satisfaite différée, le coût de rupture correspond à une estimation assez arbitraire d’un coût de traitements administratif de la demande différée.

˗  Le plus souvent, l’hypothèse de gestion indépendante des approvisionnements n’est pas acceptable, le système productif considéré devant gérer simultanément de nombreux produits en tenant compte de diverses contraintes comme celles d’un niveau maximal d’immobilisation financière ou d’utilisation d’un espace de stockage. La fonction-objectif devient alors la somme des fonctions-objectifs des problèmes élémentaires et, dans la résolution analytique du problème, on doit introduire les contraintes d’utilisation conjointe des ressources limitées considérée (Giard 2003, chap.12). On est alors amené à optimiser un lagrangien constitué de : i) la somme des fonctions-objectifs des problèmes élémentaires et ii) la somme pondérée des différences entre dotations et consommations des contraintes, par un « multiplicateur de Lagrange ».

Les solutions analytiques trouvées dans un contexte d’indépendance sont alors modifiées et ce multiplicateur de Lagrange s’interprète comme une pénalité puisqu’il mesure le coût marginal du resserrement de la contrainte sur la ressource considérée. Il faut souligner que cette pénalité n’est pas sous contrôle du décideur qui ne peut agir dessus qu’en modifiant les dotations de contraintes.

4.1.2  Système productif de type B2B

Il convient de distinguer le cas de pénalités contractuellement définies entre deux parties, de celui de pénalités définies arbitrairement

Cas de pénalités contractuellement définies. Ce cas ne suscite pas de problèmes méthodologiques particuliers car il s’agit bien d’un coût réel supporté en cas de défaillance du système. A priori, ce cas de figure ne se rencontre pas dans les modèles génériques qui traitent de systèmes fictifs. Les modèles décisionnels portant sur des systèmes réels et utilisant ce type de pénalité contractuelle sont plutôt en univers certain. On peut illustrer ce cas de figure dans la gestion portuaire : l’armateur, qui équipe le navire et le frète, est tenu de mettre un navire à la disposition de l’affréteur qui loue le navire pour acheminer ses marchandises, pour l’utiliser à quai pendant une période contractuellement définie ; en cas de dépassement de cette période, l’affréteur doit payer une pénalité financière contractuelle (demurrage) à l’armateur ; souvent, l’affréteur gère un ou plusieurs quais et travaille avec plusieurs armateurs, ce qui le conduit à devoir intégrer l’existence de ces pénalités contractuelles, proportionnelles au temps de dépassement, dans les modèles d’utilisation optimale des quais (Bouzekri et al., 2020, 2021).

Cas de pénalités arbitrairement définies. Dans une logique de chaîne logistique (CL), la production du système étudié (maillon amont, fournisseur) peut être acquise par un autre système de production (maillon aval, client) pour permettre sa propre production (par exemple, approvisionnement de composants par une usine). Rentrent dans la même catégorie les modèles de maintenance qui visent à gérer la disponibilité d’un équipement fournissant des prestations opérationnelles à un atelier. On s’intéresse ici à des modèles décisionnels portant sur des systèmes fictifs ou réels fonctionnant en univers aléatoire, la modélisation en univers certain ne présentant que peu d’intérêt.

Dans ce contexte, la non-satisfaction de la demande a des conséquences bien différentes de celles analysées au §3.2.1, car elle induit un arrêt de production sur un poste de production du système client. La propagation dans temps et dans l’espace de cette rupture d’approvisionnement conduit progressivement à des arrêts de production en amont et en aval du poste concerné, respectivement par saturation de stock et désamorçage (composants manquants). Cette propagation est particulièrement rapide si la production du client est organisée en ligne. Dans ce contexte, les conséquences économiques ne sont pas directement liées à un nombre ou une durée de rupture de stock.

Certains modèles d’approvisionnement proposent une solution analytique s’appuyant sur une distribution de probabilité de la durée de rupture et l’usage d’une pénalité horaire ou sur une pénalité indépendante de la durée de rupture, supportée en cas de rupture d’approvisionnement (Naddor, 1966) ; de tels paramètres semblent difficiles à déterminer objectivement.

Ce problème peut être pris de manière radicalement différente, s’il est possible d’anticiper l’occurrence de la rupture de stock d’une journée ou deux, ce que l’interconnexion des systèmes d’information permet assez facilement. On peut alors envisager de mettre en place une procédure d’approvisionnement d’urgence certes coûteuse mais empêchant la rupture de stock de se produire (Sali & Giard 2015). Selon la solution d’urgence retenue, la pénalité peut être proportionnelle au nombre d’unités manquantes (solution de type DHL) ou varier par palier (par exemple, affrètement d’un ou plusieurs avions ou camions).

4.2    Orienter le choix d’une solution optimale sans prise en compte de pénalité

On peut identifier deux cas de figure justifiant l’usage de pénalité pour choisir une solution ayant la même efficience (§4.2.1) ou adoptant un périmètre plus large du problème posé, pour tenir compte d’une préférence d’un client industriel (B2B) (§4.2.2).

4.2.1  Critère d’efficacité destiné à orienter le choix entre des solutions également efficientes.

À efficience égale, les solutions d’un problème peuvent ne pas être équivalentes. Dans un problème d’ordonnancement faisant l’objet d’une planification glissante, entre deux solutions ayant la même performance économique, on préfère celle qui propose « globalement » l’ordonnancement le plus précoce. Pour ce faire, on peut ajouter, dans la fonction-objectif, une somme de dates d’achèvement des tâches, pondérées par une pénalité suffisamment faible pour n’avoir aucun impact sur le critère d’efficience. De la même façon, dans la gestion d’un port, il est souvent préférable de favoriser l’accostage des bateaux, au plus près de la terre (Bouzekri et al. 2020).

4.2.2  Prise en compte d’un critère d’efficacité d’un client du système étudié (B2B)

Ce cas de figure peut se poser dans les modèles décisionnels établis en univers certain et portant sur des systèmes réels correspondant à des maillons productifs d’une CL continue ou hybride (B2B). Dans ce contexte, le maillon amont MP1, pour lequel on établit un modèle décisionnel a pour client un maillon-aval MP2 de la CL qui définit sa demande en quantité et qualité. Pour mieux faire comprendre la problématique des pénalités dans ce cas de figure, nous nous appuyons sur un exemple réel (Bamoumen et al., 2020).

Contrairement aux processus discrets dans lesquels on arrive à maîtriser la qualité des composants et modules utilisés et produits, la production continue est tributaire des caractéristiques de la matière première, lesquelles ne sont pas stables. Par exemple le lot de minerais de phosphate utilisé par MP2 pour fabriquer un lot d’acide phosphorique est fourni par MP1 qui fabrique ce lot par mélange de minerais extraits par le maillon de l’extraction de la CL, dont il est client. Ces minerais extraits sont de compositions différentes et leur production dépend de contraintes géologiques. Le mélange demandé par MP2 doit respecter une charte-qualité définie par des plages de valeurs pour quelques composants chimiques et MP1 cherche la solution la plus économique pour lui, tenant compte des disponibilités de minerais extraits. Ces contraintes de composition sont relativement faciles à prendre en compte mais le problème additionnel est que deux lots de minerais livrés successivement à MP2, tout en respectant la charte qualité, n’ont pas la même composition. Au changement de lots de minerais dans la ligne de la fabrication d’acide phosphorique, ces différences peuvent nécessiter, des ajustements coûteux du processus de production d’acide, difficiles à quantifier. Dans ces conditions, il est souhaitable de stabiliser la composition des lots expédiés à MP2, en cherchant à minimiser un indicateur de déviance de la composition des lots produits par MP1, autour de valeurs-cibles pour leurs compositions. Il s’agit là d’un indicateur d’efficacité pour MP2 que MP1 peut intégrer dans la recherche de sa solution de blending.

Dans ce contexte, on peut utiliser une fonction-objectif constituée de la somme de la fonction-objectif de coût (qui correspond à une réalité économique) et du produit de l’indicateur de déviance par une pénalité fictive. Ce faisant, on est assuré de trouver une solution, s’il en existe une, en l’absence de prise en compte de la déviance. En faisant varier progressivement cette pénalité, la déviance diminue pour atteindre une limite déterminée par les disponibilités de minerais extraits. On peut alors établir un graphe représentant le couple « déviance- coût de production », ce qui permet d’établir l’accroissement de coût pour MP1 imputable à une réduction de déviance pour MP2. Ces informations constituent une base possible de négociation de contraintes entre MP1 et MP2, et permettre d’améliorer la performance consolidée de MP1 et MP2. Dans cette perspective, la signification de la pénalité et de son niveau n’a pas grande importance. Une telle approche, testée sur la CL de l’OCP (Azzamouri et al., 2020 ; Bamoumen et al., 2020), est facilement transposable dans d’autres contextes de CL.

5.     Conclusion

La recherche opérationnelle, et en particulier la programmation mathématique, est une approche mobilisée par de nombreuses disciplines, pas seulement celle du génie industriel. Toutes partagent un objectif d’amélioration de l’efficacité d’un système à contrôler. Dans cette perspective, l’apport de beaucoup d’articles réside dans la prise en compte de contraintes jusqu’à lors négligées. Il s’ensuit une amélioration de la représentation de la réalité mais aussi une difficulté accrue des problèmes à résoudre numériquement. Cette dernière conséquence conduit de nombreux chercheurs à se pencher sur la création de méthodes de résolution qui constituent souvent l’apport principal de l’article. Deux remarques peuvent être formulées sur cette « dérive ».

-  L’arrivée des ordinateurs quantiques relèguera au second plan le problème de résolution numérique, au profit de l’intérêt et de la pertinence de la modélisation.

-  Il convient ensuite de souligner que ces problèmes numériques s’estompent avec une modélisation des problèmes de programmation mathématique mobilisant un AML (Algebraic Modeling Language ; Fourer 2013) utilisé par un modeleur (Xpress, Gams…) permettant l’usage de prédicats pour limiter considérablement l’espace de définition des variables et réduire le nombre de contraintes (ce qu’illustre bien l’article de Bouzekri et al., 2021).

L’introduction d’un critère d’efficience implique la présence de variables d’état permettant une évaluation économique pertinente. Ce changement de perspective a un impact sur la modélisation. Il peut conduire à la création de nouvelles variables d’état par le biais de nouvelles relations, mais aussi à une prise en compte de l’efficacité sous forme de contraintes ou, indirectement, par le biais de la fonction économique (pénalités…).

La prise en compte de l’efficience ne constitue un apport majeur à la prise de décision, que si celle-ci est correctement définie. Les précautions méthodologiques relatives au système de valorisation décrites dans cet article doivent conduire à plus de prudence dans l’utilisation des préconisations des modèles proposés par les chercheurs. Elles doivent aussi inciter les chercheurs à se préoccuper davantage de la pertinence des coûts qu’ils mobilisent, mais aussi à concevoir des modèles dont l’évaluation économique est correctement explicitée. A cet égard, une collaboration plus intense entre chercheurs en recherche opérationnelle et chercheurs en sciences de gestion est susceptible d’améliorer la pertinence des modèles économiques en management industriel.

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7.     BIOGRAPHIE

 Najat BARA : Najat Bara a obtenu le doctorat en Sciences de Gestion de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est actuellement Post-Doctorant à l’EMINES-Université Mohammed VI Polytechnique. Ses travaux de recherche portent principalement sur des problématiques de valorisation économique et du Supply Chain management.

 

 Frédéric GAUTIER: Frédéric Gautier est professeur des universités à l’IAE Paris, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et professeur affilié à l’EMINES School of Industrial Management de l’Université Mohammed VI Polytechnique de Benguerir. Ses travaux portent sur l’évaluation économique et le pilotage des chaines d’approvisionnement et des projets.

 

  Vincent GIARD: Professeur émérite à l’Université Paris-Dauphine, PSL (http://www.dauphine.fr) et professeur affilié à l’EMINES School of Industrial Management (http://www.emines-in genieur.org) de l’Université Mohammed VI Polytechnique de Benguerir. Il est un spécialiste de management industriel et de management de projets (http://www.lamsade.dauphine.fr/~giard/ )

 

1 Najat Bara, EMINES, UM6P, Maroc Najat.bara@emines.um6p.ma ,

     https://orcid.org/0000-0001-6834-6532

2 Frédéric Gautier, IAE Paris, Université Paris I Panthéon-Sorbonne, gautier.iae@univ-paris1.fr ,

      https://orcid.org/0000-0001-9520-2737

3 Vincent Giard, Université Paris-Dauphine, PSL Research University, vincent.giard@dauphine.psl.eu ,

      https://orcid.org/0000-0003-4818-8279