2023, Vol. 37, No. 3, 09-16

Revue Française de Gestion Industrielle

article en open accès sur www.rfgi.fr

https://doi.org/10.53102/2023.37.03.1200

ISSN: 0242-9780

eISSN: 2804-9284


Développement durable : analyse rétrospective des articles précurseurs

Nathalie Fabbe-Costes ……1,

1 Professeur agrégé des universités en sciences de gestion, Aix-Marseille Univ, CERGAM, Aix-en-Provence, France, nathalie.fabbe-costes@univ-amu.fr



Résumé : Les articles étudiés pour la thématique développement durable montrent à quel point elle soulève des questions complexes et évolutives. L’analyse des articles conduit à souligner la nécessité de prendre en considération les contextes – notamment règlementaire, stratégique et technologique –, pour explorer et exploiter toute la richesse des situations de recherche abordées, répondre aux questions posées ainsi que progresser vers des pistes de solution. Les recherches ancrées permettent aussi de révéler les mécanismes à l’œuvre et de comprendre les enjeux et les comportements face aux indispensables changements à opérer.

Mots clés : Développement durable ; logistique inverse ; éco-conception ; économie circulaire

Sustainable development: retrospective analysis of pioneering articles


Abstract: The articles studied for the sustainable development theme show the extent to which it raises complex and evolving issues. The analysis of the articles highlights the need to take into account of the context – in particular regulatory, strategic and technological – in order to explore and exploit the full richness of the research situations addressed, to answer the questions posed and move towards possible solutions. Grounded research also helps to reveal the mechanisms at work and to understand the issues and behaviors at stake in the face of the essential changes that need to be made.

Keywords: Sustainable development; reverse logistics; ecodesign ; circular economy


Citation: Fabbe-Costes , N. Développement durable : analyse rétrospective des articles précurseurs. Revue Française de Gestion Industrielle, 37(3), 09-16. https://doi.org/10.53102/2023.37.03.1200

Historique : en ligne le 21/12/2023

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Développement durable : analyse rétrospective des articles précurseurs

  1. INTRODUCTION

    Le développement durable est une notion qui est apparue fin des années 1980. Le Rapport Brundtland publié en 1987 par la commission des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement le définit comme « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». En 1992, le Sommet de la Terre à Rio a consacré la nécessité de progresser dans ce sens. Il a débouché sur l’adoption par 182 chefs d'États (dont la France) de l’agenda 21 – premier programme d’actions concrètes – ainsi que de plusieurs conventions qui structurent encore aujourd’hui les travaux internationaux.

    Dès le début, le « développement durable » fixe trois importants objectifs : équilibrer le développement sur trois piliers (économique, écologique et social) ; adopter une gouvernance des activités incluant plus de démocratie participative ; trouver un modèle de développement permettant de vivre harmonieusement sur et avec la planète. Il ne peut donc y avoir de développement durable sans un engagement multinational, multi-niveaux et multi-acteurs avec des actions menées à court, moyen et long terme.

    Dès le sommet de Rio, les activités industrielles – au sens large – ont été pointées du doigt. La nécessité de considérer l’ensemble de leurs impacts sur la planète – notamment les externalités négatives à court, moyen et long terme –, a conduit de nombreuses parties prenantes à pousser les entreprises à s’engager dans des changements. Il leur a aussi été demandé de « rendre compte » de leurs progrès (au début dans le cadre de reporting volontaires). Des organismes indépendants (comme le GRI – Global Reporting Initiative – fondé en 1997) ont travaillé à l’élaboration de séries d’indicateurs de « performance durable » pour structurer les reportings et faciliter le benchmarking.

    Depuis 2000, le Pacte Mondial des Nations Unies

    invite les entreprises et organisations du monde entier à adopter une démarche volontaire en faveur du développement durable. En signant le pacte, elles s'engagent à en respecter les principes et à progresser chaque année dans chacun des thèmes, structurés en 17 objectifs de développement durable (17 ODD) depuis 2015 dans l’agenda 2030 (qui a remplacé l’agenda 21). Les entreprises signataires s’engagent aussi à remettre un rapport annuel (Communication sur le Progrès – COP) expliquant les avancées concrètes réalisées. Les grandes entreprises n’ont pu ignorer cet appel.

    Malgré cette incitation et la pression d’ONG activistes, relayée par une opinion publique de plus en plus sensible au développement durable (même si les actes des citoyens-consommateurs ne sont pas toujours en accord avec cette aspiration), toutes les entreprises ne se sont pas engagées dans des stratégies de développement durable volontaristes. Au-delà des déclarations et des bonnes intentions, certaines restent par ailleurs peu transparentes sur les efforts réellement faits ainsi que sur leurs résultats ou progrès.

    Afin d’amplifier le mouvement vers un développement plus durable, certaines instances internationales et états ont donc considéré indispensable de mettre en place des mesures incitatives plus précises, voire d’adopter des mesures coercitives pour pousser les entreprises à adopter des comportements plus vertueux. Ainsi, une série d’accords internationaux (protocole de Kyoto, accords de Paris) ont été successivement élaborés pour donner un cadre d’action global engageant les États qui les ratifient à relayer l’action au niveau local.

    De nombreux États européens, dont la France, se sont engagés dans cette voie. Avec la loi n° 2001-420 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE), promulguée en France en 2001 (et appliquée en 2003), c’est une obligation de s’engager dans la


    RSE (qui opérationnalise la notion de développement durable) qui s’impose aux entreprises cotées à qui il est expressément demandé de rendre des comptes des effets qu’elles exercent sur la société. En parallèle de règles globales, de nombreuses directives plus ciblées ont été adoptées pour avancer sur des points critiques à traiter en priorité. Dès le début des années 2000, la Commission Européenne a ainsi poussé plusieurs initiatives, comme la Politique Intégrée des Produits (2001), suivie de directives sur les déchets (notamment celles de 2006, 2008 et 2018) dont l’objectif est de mieux gérer et valoriser les flux de déchets et surtout d’éviter d’en produire en jouant sur l’éco-conception des produits. Depuis les années 2010, il est recommandé d’évoluer vers une économie circulaire, promu en France par l’Institut de l’Économie Circulaire (INEC) créé en 2013.

    Plusieurs jalons ont ainsi marqué l’évolution de la réglementation, reconnue plus efficace pour faire bouger les lignes que les incitations, avec un accent porté dans un premier temps sur les questions environnementales (comme en France avec le Grenelle de l’environnement en 2007 qui a débouché sur la loi Grenelle I en 2009), puis dans un second temps sur le volet social et sociétal. En parallèle de ces obligations, plusieurs normes ont été développées pour donner des cadres et des démarches, ainsi que pour certifier les pratiques conformes aux attentes. De nombreuses entreprises ont ainsi recherché reconnaissance et légitimité à travers des certifications ISO 9000, 14000 ou 26000, ou des labels (comme le B-Corp depuis 2006). Des démarches volontaires ont par ailleurs été engagées (exemple en France par l’ADEME) pour enclencher le mouvement, accompagnées parfois de financement pour encourager à investir dans le changement.

    Le monde académique n’est pas resté indifférent à ces évolutions et transformations. Certains chercheurs sont à l’origine de la « pensée » en matière de développement durable. D’autres ont accompagné les travaux des instances internationales. En France, de nombreux chercheurs ont participé aux réflexions et démarches de l’État, des agences (comme l’ADEME), d’instituts spécialisés (comme l’INEC), ainsi que de

    groupements ou d’associations professionnelles ou encore d’entreprises et organisations.

    Dès les années 1990, les chercheurs en gestion industrielle, gestion des opérations et logistique, se sont intéressés aux questions en lien avec le développement durable avec des travaux souvent conceptuels et prescriptifs. Les travaux se sont multipliés à partir des années 2000, comme le montrent plusieurs revues de littérature systématiques réalisées depuis les années 2010. Certains chercheurs se sont emparés du sujet de l’éco-conception des produits, de la gestion (et réduction) des déchets, de l’organisation/optimisation des reverse logistics, du pilotage de chaînes logistiques en boucle (closed- loop supply chains) concrétisant la notion d’éco- logistique intégrée. De l’éco-conception à la fin de vie, en passant par toutes les modalités de réutilisation, réparation, refabrication ou recyclage, ce sont des chaînes complètes qui se transforment en recherchant des progrès environnementaux et sociaux. De la vente de produits à celle de leur usage et/ou de leur partage, ce sont des logiques de conception – production – distribution – retour qui se repensent, jouant de l’effet de levier de nouvelles technologies, notamment depuis le début des années 2000 (avec Internet) et depuis les années 2010 (avec l’industrie 3.0).


  2. PRESENTATION SYNTHETIQUE DES TROIS ARTICLES, DE LEURS RESULTATS ET DES POSSIBLES PROLONGEMENTS

    Les trois articles retenus pour le « collector » de la RFGI témoignent des recherches menées dans la période 2000 – 2015 (année des derniers numéros de la RFGI pris en compte pour le collector). Ils rendent compte de travaux « ancrés » qu’il convient de relire en gardant en mémoire l’année de leur publication et le contexte (entreprises, secteurs, environnements stratégique et réglementaire). Ils témoignent de la volonté des chercheurs de produire des connaissances utiles d’un point de vue managérial et sociétal tout en fournissant de bonnes bases de réflexion au plan académique.


    1. Logistique inverse : un maillon essentiel du développement durable - Dupont et Lauras (2007)


      Figure 1 : Capture d’écran de l’article original

      (Dupont et Lauras, 2007)

      L’article de Dupont et Lauras (2007) s’intéresse à la logistique inverse vue comme un maillon essentiel du développement durable. Après avoir rappelé que les préoccupations écologiques ou liées aux dangers industriels ne sont pas récentes, et retracé le contexte de l’époque en matière de développement durable, l’article se concentre sur la logistique inverse. Il détaille les trois catégories d’enjeux qui justifient pourquoi les entreprises industrielles doivent s’intéresser à la logistique inverse : les impositions légales auxquelles les entreprises doivent répondre, les opportunités de différenciation qu’elle offre dans un contexte de forte pression concurrentielle, et l’intérêt économique que les entreprises peuvent trouver en lien avec la réduction de certains coûts, la valorisation des flux inverses et la rémunération de nouveaux services offerts.

      Les auteurs adoptent une vision globale des flux « inverses » (non limités aux flux de déchets). Ils proposent (§.4.1) une typologie des flux inverses composée de huit grandes classes. Ils étudient (§.4.2) les processus de la logistique inverse et insistent sur la nécessité de cartographier et modéliser les processus, en pointant quatre étapes clés : l’entrée des flux (appelée « barrière »), la collecte, le contrôle et le tri, le traitement et la valorisation. Ils soulignent aussi l’importance de la gestion documentaire et du système d’information (§4.2.5) pour tracer et piloter les processus de la logistique inverse. Ils dégagent ensuite (§.5) les grandes différences entre la logistique directe et la logistique inverse. Ils terminent leur article en insistant sur la nécessité de coupler logistique directe et inverse, de travailler sur l’ensemble du cycle de vie du produit, depuis l’éco-conception, pour limiter les flux inverses aux flux apportant de la valeur pour l’entreprise et la société.

      Cet article témoigne de la volonté de la RFGI de constituer une base de connaissances et de travail à la fois solide, concrète et pédagogique. Les principes exposés et illustrés dans l’article restent très pertinents et méritent d’être relus. Au-delà des points clés résumés précédemment, l’article montre que les bénéfices de la logistique inverse ne peuvent venir que d’une connaissance très précise des flux concernés, d’une modélisation fine des processus, tout en abordant le problème dans sa globalité : de la conception des produits à leur fin de vie. Il montre aussi que cela suppose une réflexion interfonctionnelle dans les entreprises et interdisciplinaire en recherche : combinant vision industrielle (génie industriel), et vision stratégique, commerciale, marketing, et logistique (sciences de gestion). Il montre aussi l’importance du système d’information dans la transformation à mener ainsi que l’enjeu de développer un contrôle de gestion plus poussé avec des indicateurs plus pertinents pour aider à la réflexion et décision.

      Plusieurs pistes mériteraient d’être approfondies dans de futurs articles. Dans le contexte contemporain de la digitalisation, de l’industrie 4.0, un travail plus détaillé sur les enjeux et le rôle du système d’information mériterait d’être développé. L’article évoque aussi le développement, par les


      firmes industrielles, de services liés à la logistique inverse. Ce mouvement de servitization, engagé depuis quelques années, et qui est facilité par la digitalisation, mérite des études plus poussées. Enfin, l’article invite aussi à étudier l’évolution de l’écosystème des firmes industrielles, tant pour ce qui concerne les nouveaux acteurs que les nouvelles relations d’affaires.

    2. La responsabilité élargie des producteurs industriels, du traitement des déchets à l’éco- conception – Pluchart (2012)


      Figure 2 : Capture d’écran de l’article original (Pluchart, 2012)

      L’article de Pluchart (2012) s’intéresse à la responsabilité élargie des producteurs industriels. Il centre sa réflexion sur les pratiques des entreprises concernées par les déchets industriels dangereux. Il s’inscrit donc dans l’actualité de la directive européenne sur les déchets de 2008 qui contraint les entreprises à mieux gérer leurs déchets industriels. Il s’intéresse à la manière dont les entreprises interprètent et mettre en œuvre les directives.

      L’article rappelle le contexte hétérogène et évolutif du cadre normatif et réglementaire relatif aux déchets et rejets industriels, notamment ceux considérés comme des facteurs de risques. Il montre la diversité des exigences qui pèsent depuis longtemps sur les entreprises industrielles, renforcées par les règlementations liées au développement durable, et qui devraient les pousser à adopter un comportement plus vertueux.

      L’auteur s’appuie ensuite sur quatre cas pour montrer la variété des comportements des entreprises. Les deux premiers cas témoignent de l’existence d’entreprises visionnaires et proactives, qui ont anticipé voire devancé les réglementations, développé un ensemble d’actions volontaristes en manière de RSE, et se sont engagées dans un changement profond avec une vision à long terme. Les deux autres cas correspondent à des entreprises qui, soumises à la pression des directives, se

      « débrouillent » (de manière réactive) en ayant parfois recours à des pratiques ou circuits illégaux, ou en externalisant la gestion de leurs déchets et transférant le problème dans des pays aux réglementations moins contraignantes.

      Bien que les cas ne soient pas comparables, ils montrent des profils qui restent tout à fait d’actualité. Les cas, qui mériteraient une analyse plus systématique, permettent néanmoins de dégager des points clés relatifs à la portée des réglementations et leur capacité à faire adopter des comportements plus vertueux. L’article montre l’importance de décliner le développement durable en objectifs de RSE, puis de travailler dans le détail les processus physiques de la REP, et de développer des mesures de performance durable adaptées aux objectifs, ce qui suppose de disposer de données fiables. Il montre aussi les enjeux, mais aussi la difficulté, d’adopter l’éco-conception pour limiter la production de déchets, et la nécessité de développer un nouveau mode de pilotage « éco- responsable » des entreprises. Il attire l’attention sur la nécessité de développer en permanence les compétences à tous les niveaux des entreprises pour être capable de concevoir et déployer des actions pertinentes.

      Depuis 2014, le cadre normatif et réglementaire a continué à évoluer, renforçant l’idée que l’effort de transformation doit, lui aussi, être permanent. La complexité des supply chains (SC) contemporaines appelle des travaux sur la manière d’entraîner l’ensemble de l’écosystème des entreprises dans la transformation. La responsabilité « élargie » ne repose en effet pas que sur l’entreprise industrielle, même si elle se considère le pivot de la SC. L’article souligne aussi que les réglementations, surtout lorsqu’elles ne sont pas harmonisées, n’empêchent


      pas les comportements opportunistes, frauduleux voire mafieux. Il convient donc de réfléchir aux pistes pour les limiter. La proposition de développer un pilotage éco-responsable multi-niveaux demande aussi à être testée sur un périmètre élargi (idéalement l’ensemble de la SC), en considérant les apports des nouvelles technologies.

    3. L’économie circulaire : quelles mesures de la performance économique, environnementale et sociale ? – Bonet, Petit et Lancini (2014)


      Figure 3 : Capture d’écran de l’article original

      (Bonet, et al., 2014)

      L’article de Bonet et al. (2014) s’intéresse à l’économie circulaire (EC) et aux indicateurs permettant de mesurer son impact en matière de développement durable.

      Les auteurs s’emparent sérieusement d’une notion émergente (au début des années 2010) et complexe – l’économie circulaire – en l’exposant de manière très pédagogique (§.2). L’article rappelle l’origine de cette notion, fondée sur l’écologie industrielle, qui ne se développe en France qu’à partir des années 2010, puis en expose les sept points clés. Considérée par les auteurs comme « un mode de management innovant » (p.24), l’article formule l’hypothèse qu’adopter l’EC permet de contribuer aux trois piliers du développement durable. L’article insiste particulièrement sur l’impact sur le travail et l’emploi, mettant l’accent sur la performance sociale et l’impact sociétal de l’EC, moins valorisés que son impact environnemental.


      Plutôt que de définir ex nihilo des indicateurs de mesure d’impact, les auteurs s’intéressent à trois cadres d’évaluation en lien avec le développement durable et la RSE en cours d’élaboration (cf. §.4 et 5 GRI, IRIS et SROI) pour identifier quels indicateurs pourraient rendre compte de l’EC et pourraient être adoptés pour en mesurer l’impact. Le résultat de leur analyse, qui permet d’identifier les indicateurs qui pourraient être utilisés, est qu’il y a peu d’indicateurs pour l’EC, ce qui invite à œuvrer pour en ajouter.

      Dans cette perspective, l’article présente le résultat d’une étude cas réalisée pour explorer les conditions concrètes de déploiement d’une démarche d’EC sur un territoire et la manière de rendre compte de ses impacts sociaux et sociétaux. Leur résultat est de confirmer la nécessité d’avoir des indicateurs de mesure pour évaluer l’impact de toute démarche contribuant au développement durable, que les entreprises adoptent spontanément les indicateurs existants (dans leur cas ceux du GRI), et qu’en l’absence d’indicateur adapté les entreprises en construisent. Les référentiels, souvent partiels, peuvent donc involontairement freiner les acteurs dans leur démarche.

      Cet article publié en 2014, peu après la création en France de l’INEC, confirme l’importance de travailler sur des phénomènes émergents, de participer à leur stabilisation, ainsi que de les diffuser dans la communauté académique et professionnelle. Il invite à explorer plus en profondeur et de manière plus fouillée des cas « réels » qui permettent de mieux comprendre la complexité des phénomènes et les mécanismes à l’œuvre. Il montre le caractère habilitant mais aussi limitant des référentiels : d’un côté ils offrent des repères, des méthodes et des outils à utiliser, d’un autre ils représentent un

      « langage » temporairement figé alors que l’environnement se transforme de manière dynamique.

      Aujourd’hui, l'État français semble relancer avec conviction les travaux sur l’EC, et la loi anti- gaspillage pour une économie circulaire fixe des échéances et des objectifs. C’est une opportunité


      pour poursuivre les travaux sur certains aspects évoqués dans l’article. Plus largement, certaines questions évoquées dans l’article demandent des approfondissements comme le rôle des standards et des normes dans le domaine de l’évaluation de la performance durable, et la manière de définir des indicateurs pertinents (combinant indicateurs d’état et de résultats) qui permettent de mesurer ce qui compte et ce qui a de la valeur pour les parties prenantes.


  3. PISTES POUR LES DEVELOPPEMENTS FUTURS DANS LA THEMATIQUE DEVELOPPEMENT DURABLE

    Les trois articles retenus montrent à quel point les questions en lien avec le développement durable sont complexes et évolutives. Les articles montrent aussi la nécessité de s’imprégner du contexte – notamment réglementaire, stratégique et technologique –, pour explorer toute la richesse des situations analysées et des questions explorées ainsi que des pistes de solution. Les recherches ancrées permettent de révéler les mécanismes à l’œuvre et de comprendre les enjeux et les comportements face aux changements à opérer.

    Le dernier numéro de la RFGI a été publié en 2015. Depuis, les questions de développement durable, malgré la prise de conscience internationale, les alertes du GIEC (mis en place en 1988 et dont le premier rapport a été publié en 1990), et les pressions et incitations de toutes sortes ne semblent pas avoir beaucoup avancé. L’urgence climatique, rappelée par les récents rapports du GIEC, les alertes sur les risques liés aux déséquilibres mondiaux (pauvreté, famine, conflits…) et les tensions autour de certaines ressources (eau, métaux rares…), indiquent que le développement durable n’est plus une option mais une nécessité.

    L’effort de recherche pour transformer les activités, les processus, ainsi que leur pilotage pour les orienter vers un développement plus durable est indispensable et appelle des points de vue et des méthodologies variées, si possible combinés. L’exploration d’innovations technologiques, organisationnelles ou de business model demande aussi, à l’ère de l’industrie 4.0, de se saisir des

    paradoxes, conflits et dialogiques entre innovation & durable. Loin des incantations, il est important de se saisir des problèmes concrets et des questions complexes qui se posent. Les chercheurs en gestion industrielle, gestion des opérations et logistique doivent poursuivre leurs efforts, en se posant la question de leur engagement et du rôle qu’ils entendent sérieusement jouer dans l’évolution de la situation.


  4. BIBLIOGRAPHIE

    Dupont, L., & Lauras, M. (2007). Logistique inverse : un maillon essentiel du développement durable. Revue Française De Gestion Industrielle, 26(2), 5–36. https://doi.org/10.53102/2007.26.02.724

    Pluchart, J.-J. (2012). La responsabilité élargie des producteurs industriels, du traitement des déchets à l’éco-conception. Revue Française De Gestion Industrielle, 31(2), 45–61. https://doi.org/10.53102/2012.31.02.654

    BONET FERNANDEZ, D., PETIT, I., & LANCINI, A.

    (2014). L’économie circulaire : quelles mesures de la

    performance économique, environnementale et sociale

    ?. Revue Française De Gestion Industrielle, 33(4), 23–43. https://doi.org/10.53102/2014.33.04.791


  5. BIOGRAPHIE

Nathalie Fabbe-Costes, professeur agrégé des Universités en sciences de gestion, est en poste à Aix- Marseille Université à la faculté d’économie et de gestion

depuis 1994. Après avoir longtemps fait partie du CRET-LOG, laboratoire qu’elle a dirigé de 2010 à 2019, elle est actuellement membre du CERGAM. Elle est aussi vice-présidente de l’AIRL-SCM. Ses nombreuses publications nationales et internationales s’inscrivent à l’interface de la logistique, de la stratégie et des systèmes d’information. Elle est particulièrement investie dans la direction de thèses et de projets de recherche menés en interaction avec des entreprises ou des institutions.

Nathalie Fabbe-Costes, Professeur agrégé des universités en sciences de gestion, Aix-Marseille Univ,


CERGAM, Aix-en-Provence, France, nathalie.fabbe- costes@univ-amu.fr,

https://orcid.org/0000-0001-5857-7994