Citation : Blum V., Le N.-T., Gumb B. (2024). La résonnance d’un plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme
comptable : le cas des activités extractives. Revue Française de Gestion Industrielle, 38(1), 13-34.
https://doi.org/10.53102/2024.38.01.1185
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2024, Vol. 38, No. 1, 13-34
Revue Française de Gestion Industrielle
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https://doi.org/10.53102/2024.38.01.1185
La résonnance d’un plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une
norme comptable: le cas des activités extractives
Véronique Blum 1, Nhu-Tuyên Lê 2, Bernard Gumb3
1Université Grenoble Alpes, France, veronique.blum@univ-grenoble-alpes.fr
2Grenoble École de Management, France, Nhu-Tuyên.@grenoble-em.com
3Grenoble École de Management, France, nous a quitté mardi 13 octobre.
Résu : Lorsque l'International Accounting Standards Board (IASB) a préparé une proposition de norme
relative aux activités extractives en 2010, elle incluait une question relative à la campagne Publiez Ce Que Vous
Payez (PWYP), plaidant pour la divulgation des paiements effectués par les entreprises aux gouvernements,
pays par pays. Nous évaluons la résonance de cette action de plaidoyer dans les lettres de commentaires
reçues par le normalisateur. Notre méthodologie originale combine une analyse lexicométrique, une analyse
en composantes principales et la théorie des graphes. En acceptant que les alignements lexicaux signalent un
assentiment partiel ou total des idées diffusées, nous visualisons, au sein des réseaux ou des sociogrammes,
la manière dont les discours des répondants s'alignent sur les choix mantiques de PWYP. Nos résultats
mettent en évidence un plus grand nombre de non-alignements par rapport aux alignements, et évoquent un
effort de lobbying n’ayant pas encore abouti à court terme.
Mots clés : Industries extractives ; ONG ; Normes comptables ; IASB ; Transparence ; Plaidoyer
Advocacy resonance within an accounting standard-setting due-process
procedure: the case of extractive activities
Abstract : When the International Accounting Standards Board (IASB) prepared a Discussion Paper on
extractive activities in 2010, it included a question relating to the Publish What You Pay (PWYP) campaign,
advocating for the disclosure of payments made by extractive industry companies to governments, country by
country. In order to assess the resonance of this advocacy action, we study the comment letters received by
the standards-setter. We use an original methodology combining a lexicometric analysis, principal component
analyses and graph theory. On the premise that lexical alignments signal a partial or total assent to the ideas
disseminated, we produce a visual representation of how, within networks or sociograms, respondents'
discourses align with PWYP's wording choices. Our results point to a greater number of pairwise non-
alignments compared to alignments, and to an unsuccessful lobbying effort, in the short term.
Keywords: Extractive industries; NGO; Accounting standards; IASB; Transparency; Advocacy.
ISSN: 0242-9780
eISSN: 2804-9284
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
14 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
1. INTRODUCTION
L’abondance de ressources naturelles dans un pays
coïncide rarement avec la richesse des populations
locales et avec le développement économique
national. Lorsque d’importantes inégalités
persistent en dépit des recettes substantielles
engrangées par la marchandisation de ces
ressources, l’on parle de « malédiction des
ressources » (Ross, 1999 ; McMillan, 2005). Depuis
des décennies, les industries extractives, minières et
trolières, s’approvisionnent dans des pays riches
en ressources naturelles sans que leur intervention
ne permettre d’y élever le niveau de vie des
habitants. Pour cette raison, de nombreuses
Organisations Non Gouvernementales (ONG)
tiennent l’industrie de l’extraction pour responsable
de violation des droits de l'homme. Face à ce
constat, l’ONG Global Witness (GW, 1999) fut la
première à battre campagne en faveur de la lutte
contre la corruption. Mais c’est une autre coalition
d’ONG, du nom de « Publish What You Pay » (ci-
après PWYP), qui a saisi le normalisateur comptable
international - l'International Accounting Standards
Board (IASB) -afin de réclamer plus de transparence
au sujet des paiements faits par les industries aux
gouvernements. En 2010, le projet «Activités
extractives» figure à l'agenda de lIASB, le document
de travail pour une proposition de norme 2010/01
(ci-après le DP) est ouvert à commentaires (Blum et
Krichowsky, 2023). Ce document possède la
particularité de comporter une question (n°10)
relative aux paiements alisés par les industries
extractives à destination des gouvernements, et liée
au chapitre 6 intitulé « Les propositions de Publish
What You Pay » (IASB, 2010a, p. 146-164). La plupart
des commentateurs du DP ont répondu à la
question 10, produisant ainsi un matériel unique qui
nous permet de formuler notre question de
recherche : le plaidoyer de PWYP a-t-il trouvé de la
résonance au cours du dispositif de concertation sur
une norme comptable spécifique dédiée au secteur
minier ?
Alors qu’il existe de nombreuses recherches sur le
lobbying direct, peu d’études s’intéressent à la
manière dont le soutien, ou le rejet d’un plaidoyer
se met en place, Aussi, les méthodologies capables
de mesurer les effets d'une action de plaidoyer
demeurent imparfaites (Bernhagen et al., 2014).
Notre travail opte pour une approche
méthodologique originale et inspirée des réseaux de
neurones (Bergan, 2009 ; Cluverius, 2017). Nos
résultats illustrent la théorie de l’action de
communication d’Habermas (1997, 2006) et
suggèrent que par le biais du langage, les ONG,
quittant le rôle de simple nonciateur pour
endosser un rôle de plaidoyer, produisent une
communication visible et entrent en relation avec
d’autres parties-prenantes. Si l’on constate
toutefois un échec du plaidoyer à court terme, nos
résultats suggèrent qu’il s’agit d’une étape dans le
processus de diffusion des idées, plut qu’une
impasse. Ainsi, le processus de normalisation
comptable a pu participer à la construction de
réseaux d’influence en direction des institutions
alors que comme prédit par Fleisher (2003, p. 373),
«plusieurs années peuvent être cessaires avant
qu'il ne soit possible d'observer les retombées d'un
plaidoyer». Cette intervention inédite dans le cadre
d’un projet de norme comptable dédiée aux
activités extractives crée un précédent dont il est
pertinent de tirer les leçons alors que d’une part, les
discussions sur les normes euroennes extra-
financières sectorielles vont bientôt buter et alors
que l’IASB a mis fin en Septembre 2023 au projet
d’une norme dédiée aux activités extractives en
prononçant le caractère désormais non temporaire
de la norme IFRS 6, publiée en 2006.
Le reste du document se déroule comme suit. Avant
tout, nous rappelons le contexte de la recherche et
l'émergence de mouvements pro-transparence
visant l'industrie extractive. Puis, notre revue de la
littérature, consacrée aux études portant sur le
lobbying dans le cadre du processus de concertation
sur une norme comptable, distingue deux formes de
lobbying : le lobbying grasstop, et le lobbying
grassroots, ou plaidoyer. Notre méthodologie est
ensuite exposée en détails. Elle justifie la
catégorisation des parties prenantes, le recours à la
lexicométrie, la réduction de dimensionnalité via
une analyse en composantes principales et l'usage
de la théorie des graphes pour représenter les
réseaux d’alignement ou de non-alignement du
lexique employé par les participants sur le lexique
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
13 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
de PWYP, dans les lettres de commentaire. Une
discussion suit avant de conclure et d’identifier les
futures pistes de recherche.
2. LE CONTEXTE DE LA RECHERCHE :
L’INTERVENTION DES MOUVEMENTS
PRO-TRANSPARENCE DANS LA
NORMALISATION COMPTABLE
2.1 L’émergence des mouvements de
transparence visant l’industrie minière
Les événements examinés dans ce travail trouvent
leur source dans un mouvement init par Global
Witness (GW), une ONG fondée à Londres en 1993
qui se décrit comme « pionnière dénonçant le lien
entre les ressources naturelles, les conflits et la
corruption (au nom des) droits de l'homme et de
l'environnement. » GW a obtenu sa notoriété avec
la publication de son rapport fondateur intitu « A
(C)rude Awakening » questionnant les
responsabilités des entreprises extractives face à la
pauvre, aux inégalités sociales, et aux injustices
dans la répartition des richesses. Le rapport traite en
particulier du cas de l'Angola, alors classé 160ème
sur 174 pays en termes d'indice de veloppement
humain (GW, 1999), tout en étant deuxième pays
exportateur d'Afrique, et dont l’usage de la rente
trolière demeurait opaque (McMillan, 2005).
« Les statistiques alarmantes en termes de
souffrance humaine, de pauvreté, de réfugiés, et de
l’ampleur des revenus perdus ou tournés du
pétrole » (van Oranje et Praham, 2009) publiées par
l’ONG nourrissent dès lors et de manière idite les
mouvements de protestation pro-transparence.
En 2002, deux projets révolutionnaires voient le jour
au Royaume-Uni, avec des approches divergentes
mais des objectifs convergents. Le premier est un
processus de droit souple (soft law) lancé par
l'Initiative pour la Transparence des Industries
Minières (EITI = Extractive Industries Transparency
Initiative), un manifeste pour la transparence dans
les activités minières qui se décrit comme un effort
multipartite impliquant les gouvernements, les
sociétés minières multinationales et publiques, les
entreprises et les associations industrielles, les
institutions financières internationales et les
groupes de la société civile.
Le second projet PWYP cherche l’adhésion de
l'opinion publique dans son plaidoyer pour une
divulgation obligatoire des paiements faits par les
entreprises de l'industrie extractive aux
gouvernements des pays producteurs, y compris les
procédures d'octroi de licences, les contrats, les
revenus et les budgets. La coalition PWYP identifie
rapidement le due-process des normes comptables
internationales comme une plateforme originale
pour faire connaître son opinion.
2.2 La normalisation comptable comme cible
L'IASB produit des normes comptables
internationales, adopes par la Commission
européenne et rendues obligatoires pour toutes les
entreprises cotées. Ces normes sont définies au
cours d'une procédure de « due process » (IASB,
2020), c'est-à-dire d'un processus de normalisation
incluant une phase de concertation (Camfferman et
Zeff 2007, 2015 ; European Parliament, 2016). Le
processus planif et séquencé encouragerait le
lobbying (IASB, 2020 ; Walton, 2020 p. 305) qui
parfois échoue (Kolher & Le Manh, 2018) en raison
de l'imperméabilité de la procédure aux « lobbyistes
indésirables » (Crawford, 2019). Le due-process se
roule comme suit. Dans un premier temps, l'IASB
nomme un groupe de travail, ou panel, prenant le
sujet en charge. Lorsqu'un projet de norme semble
suffisamment abouti, le groupe de travail rend
publique sa proposition de norme, sous la forme
d'un document de travail (discussion paper) ou d'un
exposé sondage (exposure draft). La proposition est
alors ouverte à commentaires pendant quelques
mois. Durant cette période, tout observateur, quel
qu'il soit, peut exprimer son avis au sujet de la
proposition de norme. Il suffit pour cela d’envoyer
une lettre de commentaire adressée au
normalisateur. Celle-ci sera rendue publique sur le
site de l'IASB. Selon le sujet, le normalisateur reçoit
d’une à plusieurs centaines de lettres. De par sa
transparence et son ouverture, le processus de
normalisation devient un forum de discussion
(Stolowy et al., 2019). Les commentateurs
s'expriment librement mais, le plus souvent, ils
choisissent de répondre aux questions formulées
par le normalisateur. Celles-ci encadrent le débat et
assurent une collecte de réponses formatées
comparables. Le normalisateur publie son analyse
de l’ensemble des lettres dans un rapport intitu
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
14 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
« feedback statement » (IASB, 2010b). En parallèle
de cette forme de concertation ouverte au grand
public, le normalisateur mène une campagne
d'information visant les parties prenantes
intéressées, sous forme de réunions appelées
«outreach». La structuration de la phase
consultative abrite l'IASB de toute critique en
responsabilité (Botzem, 2014) et « compense un
déficit de démocratie représentative par un surcroît
de transparence (Chiapello et Medjad, 2007,
2009).»
En 2008, PWYP prend part, en tant que
commentateur, au due-process de la norme IFRS 8
diée aux segments opérationnels. Si le projet a
des visées universelles et touche l’ensemble des
secteurs, PWYP cible en particulier les activités
extractives et propose d'intégrer la déclaration des
paiements aux gouvernements aux dispositions de
la norme IFRS 8. Mais, contrairement aux principes
éthiques avancés dans le cadre de la procédure de
concertation (Noël et al., 2010), linitiative échoue
car l’IASB refuse de traiter les 79 lettres envoyées
par les membres de la coalition (Crawford, 2019),
sous prétexte que ces lettres sont fortement
identiques. Le cas crée un précédent car « jamais
auparavant l'IASB n'avait fait l'objet de pressions
aussi fortes de la part de la société civile (van Oranje
& Parham, 2009)
Toutefois, la même année, l'IASB reprend le projet
de la norme sectorielle relative aux activités
extractives. Celui-ci aboutit en la publication, deux
ans plus tard, en 2010, d’un DP (IASB, 2010a) qui
reprend la question formulée par PWYP et dédie un
chapitre (6) à la description de l'objectif et de la
proposition de la coalition. Le DP est ouvert aux
commentaires jusqu'à la fin du mois de juillet 2010.
L'IASB roit 142 lettres ; toutes sont disponibles sur
son site Internet.
2.3 Notre étude de cas : la demande
d’information des paiements aux
gouvernements portée par PWYP
Le DP crit PWYP comme une coalition aidant les
citoyens des pays en veloppement riches en
ressources naturelles à rendre leurs gouvernements
redevables de l’utilisation des revenus générés par
l’extraction de ces ressources. Pour y parvenir, le
projet de PWYP exige la transparence sur les
paiements effectués auprès de chaque
gouvernement, pays par pays. Ces paiements
peuvent avoir été réalisés en espèces ou en nature
(IASB, 2010a, § 6.1 & 6.6).
La question n°10 est formulée comme suit : « Les
recherches de l'équipe de projet (de l'IASB) ont révélé
que la divulgation des paiements versés aux
gouvernements fournit des informations
susceptibles d’être utiles aux fournisseurs de
capitaux pour effectuer leur investissement, et les
décisions de prêt. Il a également constaté que la
mise à disposition d'informations sur certaines
catégories de paiements aux gouvernements
pouvait être difficile (et coûteuse) pour certaines
entités, selon le type de paiement et leurs systèmes
d'information internes. À votre avis, une obligation
de divulguer, dans les notes aux états financiers, les
paiements effectués par une entité aux
gouvernements pays par pays est-elle justifiable sur
la base des coûts-avantages? Dans votre réponse,
veuillez identifier les avantages et les coûts associés
à la divulgation des paiements aux gouvernements
pays par pays. » (IASB, 2010a, p.11). Les paiements
incluent (IASB, 2010a § 6.31) : les impôts ou
redevances payés en nature plutôt qu'en espèces,
les impôts indirects et taxes inclus dans le coût des
biens ou des services achetés à des tiers, et les
paiements nets aux gouvernements qui
comprennent à la fois une composante fiscale ou de
redevance et une composante de transaction
d'achat ou de vente. Certains paiements restent
difficiles à identifier car la clarté du système de
comptabili ne permet pas toujours de distinguer
les cas le destinataire du paiement est une
agence gouvernementale. Le cas illustre l'accession
du due-process au statut de théâtre de débats
sociétaux, procurant un espace d'expression à des
acteurs désireux de faire entendre leur voix (Pelger
& Spi, 2017). Il devient ainsi un terrain de
lobbying et un objet d'études.
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
15 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
3. REVUE DE LITTERATURE: LE LOBBYING
DANS LE CADRE DU PROCESSUS DE
NORMALISATION COMPTABLE
3.1 Le Lobbying direct ou lobbying grasstop
La littérature comptable a amplement examiné les
actions de lobbying dans le processus de
normalisation. Cependant, la plupart des recherches
se concentrent sur l'examen d'une forme de
lobbying direct (Zeff, 2002), ou lobbying grasstop,
qui vise à influencer les décideurs. Cette forme
traditionnelle de lobbying est celle crite dans la
finition la plus communément employée dans la
littérature comptable (Walton, 2020) : « Les efforts
des individus et des organisations pour promouvoir
ou entraver des règles telles que de nouvelles règles
comptables (…) ou toutes les actions que les parties
intéressées entreprennent pour influencer
l'organisme de réglementation (Sutton, 1984).»
Au-delà de cette vision opérationnelle, la théorie de
l’action de communication d’Habermas (1987,
2006) apporte un point de vue plus conceptuel et
finit le lobbying direct comme une action
stratégique consistant en un dispositif
communicationnel mis en place par un émetteur
(individu, association, institution ou autres) et visant
à influencer une autre entité afin de satisfaire ses
propres intérêts. Cette forme d'influence masquée
serait comparable à l’endoctrinement, mais se
distinguerait des actes d'influence explicites tels que
la guerre, ou les manifestations de force (Habermas,
1987). Au contraire, pour parvenir à leur objectif et
obtenir l’acceptation de leur projet, les lobbyistes
usent de la persuasion et construisent une image
flatteuse mais partielle de leur projet. Ils ciblent des
cideurs et emploient pour ce faire des moyens et
des ressources (humaines, technologiques, etc.)
conséquents. Ainsi, le succès ou l’échec du lobbying
direct sont visibles et observables respectivement
dans l’adhésion et le rejet manifestés par les
cideurs.
3.2 Le Lobbying indirect ou lobbying
grassroots, ou plaidoyer
Depuis quelques cennies, le débat public
s’intéresse à des problématiques plus hétérogènes :
l’éthique des affaires, les enjeux sociétaux, les
enjeux écologiques, les inégalités entre pays, les
inégalités inter-individuelles, etc. Ces enjeux sont
portés par des institutions comme les Nations Unies
et par exemple, clinés dans les Objectifs de
Développement Durable. Contrairement aux
actions de lobbying direct, centrées sur la
maximisation des profits d’une entité, la promotion
de ces enjeux ne relève pas exclusivement du
système économique. C’est la raison pour laquelle,
on assiste en parallèle, à l’émergence d’une
nouvelle forme de lobbying dit indirect: « Alors
qu'au départ, le lobbying était principalement le
résultat d'intérêts économiques, une nouvelle forme
de lobbying est également apparue, celle
d'associations non gouvernementales,
d'organisations de consommateurs et de groupes de
citoyens, fendant des idées ou des projets et
mettre en commun leurs ressources (Lorenzani,
2014 citant Barroso en 2010). »
La littérature sociologique et politique qualifie cette
forme de lobbying indirect de lobbying grassroots
ou de plaidoyer. Il s’agit d’une forme plus informelle
de lobbying qui se différencie du lobbying
‘traditionnel’ direct par son absence de focalisation
sur une cible. Le lobbying indirect ou grassroots
cherche plut l’adhésion d’un large public compo
d'une masse d'acteurs, comme par exemple, les
consommateurs (Bouwen, 2002a ; Fleisher, 2003).
Pour y parvenir, il crée des réseaux capables de
participer à la dissémination des idées. Le réseau
s’entend comme « un processus
d'intercompréhension » susceptible de construire
« un consentement motivé rationnellement,
concernant le contenu d'une expression (Callon &
Latour, 2006).» L’on voit que les formes de lobbying
directe et indirecte interviennent à difrents
niveaux et impliquent respectivement des
macroacteurs et des microacteurs, alors que « par
rapport aux politiciens et aux lobbyistes, les acteurs
de la société civile sont dans la position la plus faible
(Habermas, 2006)
Fon sur des situations réelles et parfois urgentes,
le lobbying indirect impose la mise en œuvre rapide
de dispositifs institutionnalisés, notamment outre-
Atlantique, les spécialistes s'organisent et se sont
dotés d'un manuel du plaidoyer (EASNA, 2012). Ce
guide présente des modes d'action et des pratiques
opérationnelles structurant l’action des lobbyistes.
Il les aide àfendre leurs idées et à endosser le rôle
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
16 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
de plaidoyer. Parce que le respect de l’éthique du
discours (Habermas, 2006) est fondamental, le
discours, le dialogue et le langage se présentent
comme des outils de travail disponibles, efficaces et
non polémiques. Le lobbying indirect sinscrit ainsi
dans une action communicative, qui « (…) consiste à
engager une relation interpersonnelle par le biais du
langage; et vise à parvenir à un consensus »
(Habermas, 1987).
3.3 L’examen des actions de lobbying direct
et indirect, une synthèse
Notre revue de littérature a mis en évidence des
difrences conceptuelles et opérationnelles
notoires entre les formes de lobbying direct et
indirect. Ces difrences s’étendent aux résultats
des modes de lobbying.
La mesure du succès des actions de lobbying direct
repose sur le compte des voix favorables
(Bouwen, 2002a,b), ou sur l'analyse de la
composition du conseil d'administration ou du panel
de l'IASB alignés sur les objectifs poursuivis
(Asekomeh et al., 2006 ; Noël et al., 2010 ; Chantiri-
Chaudemanche & Kahloul, 2012 ; Gorton, 1991) ou
encore dans l'étude des montants de ressources
disponibles (taille du marché boursier du pays)
allouées au normalisateur par le biais de
contributions financières (Hansen, 2011).
Au contraire, le succès du plaidoyer se mesure par
la capacité des lobbyistes à transmettre des
informations via un large public (Hansen, 2011 ;
Polk, 2002). Son résultat englobe l'impact
concrètement exer sur le gulateur (Hansen,
2011 ; Mattli & Buthe, 2005), et sur les parties
prenantes. Dans le cas comptable, les contenus les
lettres de commentaires constituent un matériau
dans lequel il est possible de chercher des traces de
dissémination des idées (Burke & Gunny, 2022 ;
Hashim et al. 2022 ; Jorissen et al. 2012 ; Larson &
Herz, 2013). Aussi, au-delà du manque de
méthodologies adaptées, il n'est pas possible
d'étudier les résultats du plaidoyer et ceux du
lobbying direct avec la me approche
méthodologique. C’est pourquoi, les théories du
lobbying indirect n'ont pas encore été
rigoureusement testées et validées (Bergan, 2009
Bernhagen et al., 2014). Le tableau 1 synthétise les
difrences entre les deux formes de lobbying.
Tableau 1 : Comparaison des caractéristiques des
lobbying grasstop et grassroots
Lobbying Grasstop
Lobbying Grassroots
Objectifs et approche
employée
Influence directe sur les décideurs
Approche informelle, influence indirecte sur les
décideurs par la mobilisation en masse des acteurs
Profil du communicant
Lobbyiste
“Avocat”, plaidoyer
Intérêts représentés
Représente des intérêts spéciaux
Représente des groupes d’intérêt général ou des
groupes marginalisés
Ressources à disposition
Ressources de haut niveau et techniques
professionnelles
Faibles ressources et imitation des méthodes de
communication institutionnelle ou organisationnelle
Type d’action menée
Engagement à haut niveau / par le haut
monstration de pouvoir, subvention
Endoctrinement
Engagement par le bas (par la racine)
Relations interpersonnelles par moyens de langage
Suscite la participation publique
Construction de réseau
Visibili du résultat
Succès ou échec en référence aux
objectifs initiaux
Votes en faveur du projet
Interaction entre les acteurs
Impressions partagées
Diffusion des idées
Mesure du résultat
Impact sur les régulateurs mesuré par les
votes favorables
Adoption d’une réglementation alignée
sur les attentes/ intérêts défendus
Impact sur les régulateurs grâce à la dissémination
des idées dans l’opinion publique
Niveau de consensus dans le réseau
Approche théorique selon
Habermas
Action stratégique
Action Communicationnelle
Source : Les auteurs
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
17 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
4. LA METHODOLOGIE DE RECHERCHE
4.1 Considérations thodologiques
La mesure du succès d’une action de lobbying direct
présente de nombreuses défis (Bernhagen et al.,
2014) : (i) les résultats des succès du lobbying sont
difficiles à identifier et à saisir (Walton, 2020), (ii) les
relations, les objectifs et les stratégies sont en
perpétuel mouvement, (iii) les résultats sont
sensibles à la nature et aux processus associés à
l'influence sur les cideurs politiques et, (iv) les
résultats dépendent de nombreuses variables,
difficiles à mesurer ou à quantifier (Fleisher, 2003),
(v) la collecte et l'analyse des dones recourent
principalement à des enqtes basées sur des
perceptions non exemptes de biais et de
régresseurs endogènes (Bergan, 2009) qui
supposent des relations causales difficiles à prouver
(Center for Lobbying in the Public Interest, 2001,
2005).
Le plaidoyer cherche à développer des réseaux de
communication (EASNA, 2012) comme plateformes
de diffusion d'idées, en s'appuyant sur le progrès
des médias et de la technologie (Goldschmidt et al.,
2011 ; Lorenzani, 2014). Aussi, la collecte de
difrents points de vue par les responsables publics
pend de l’activi des individus (Fleisher,
2003). Toutefois, la mesure de l’intensité de cette
activité n’est pas un indicateur de résultat robuste
car elle n’est pas nécessairement corrélée au succès
de l’action de lobbying. Dans le cas du lobbying
indirect, les tentatives de diffusion des idées ne
préjugent pas de leur propagation effective. Aussi,
une approche aquate pour évaluer les actions de
lobbying grassroots au service d’un plaidoyer
consiste à rechercher des traces de diffusion des
idées (Bouwen, 2002a, p.7).
Nous suivons Habermas (1987, 2006) et Luhmann
(1997) qui suggèrent que la diffusion des idées peut
être mise en évidence par l'analyse de la résonance
du discours, par exemple, en collectant les
« attitudes pour ou contre des questions publiques
controversées (…) influencés par le discours
quotidien dans des cadres informels ou
épisodiques (Habermas 2006, p. 416)». Pareille
ambition reste toutefois difficile à opérationnaliser
dans le cas du plaidoyer (Fleisher 2003, p. 373), car
la mesure de l'opinion est l'une des tâches les plus
épineuses à laquelle sont confrons les
politologues. Toutefois, des travaux récents
contribuent significativement à faire progresser les
méthodes. Stolowy et al. (2019) sont par exemple
parvenus à analyser la résonance du discours en
observant la manière dont les modèles narratifs se
diffusent dans les médias et participent à la
légitimation du rôle de lanceurs d'alerte. Fleisher
(2003, p. 376), de son côté, a recensé seize
candidats méthodologiques pour évaluer les actions
de lobbying. Parmi eux, l'approche
communicationnelle cherche à évaluer la qualité
des communications entre les responsables des
programmes de plaidoyer et les participants au
réseau. L'approche repose sur l'identification de
trois éléments critiques de la communication :
l’émetteur, le support et le destinataire, et les
riodes de pré et post-communication.
Dans notre étude de cas, tous ces éléments sont
identifiables. Premièrement, les émetteurs agissant
sous l'égide de PWYP sont des ONG ayant recherché
des plateformes de communication susceptibles de
procurer à leurs idées une visibilité accrue.
Deuxièmement, leur message, est contenu dans un
texte unique, le chapitre 6 et la question 10 du DP,
et peut donc être isolé et examiné. Le support choisi
par l'expéditeur est l'arène comptable et plus
précisément le due-process de l'IASB. Cette arène
regroupe des experts et des observateurs, mais
aussi des institutions dont l'approbation pourrait
renforcer la légitimité des idées promues par PWYP
(Pelger & Spi, 2017). La question 10 et le chapitre
6 du DP ayant offert à PWYP une opportunité unique
de plaidoyer, les réponses sous forme de
commentaires y expriment la perception du
message de PWYP par les répondants. Il est
important de noter qu’il n’y a pas d'autre forme
d’interaction (visible) entre les participants et leur
interconnexion se cristallise autour de leur
communication en réaction à la question 10. Toutes
les lettres sont envoyées durant la riode de
commentaires, le matériel collecté est ainsi inscrit
dans une seule unité de temps, lui procurant
robustesse et stabilité. Troisièmement, l’ensemble
est destiné à l’IASB, le destinataire final qu’il est
possible de cibler dans le cadre du due-process.
Enfin, les jalons chronologiques sont identifiables.
Le message contenu dans la question 10 et le
chapitre 6 est publié en pré-période, tandis que les
lettres de commentaires des répondants sont
envoyées en post-période. La « période »
intermédiaire de lecture et du temps nécessaire
pour construire la réponse, est aussi la riode
d’appropriation et de diffusion des ies de PWYP.
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
18 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
Notons toutefois que l’on pourrait, à l’instar de
Stolowy et al. (2019), analyser une situation de
lobbying se déroulant sur un temps plus long et
visant d’autres institutions, dans laquelle l’IASB
jouerait le rôle de média. Notre parti-pris est
difrent : il consiste à limiter l’examen à l’unité de
temps finie par la période de commentaires et à
la résonnance immédiate du plaidoyer auprès des
participants au due-process.
4.2 La catégorisation des répondants
La première étape de notre recherche consiste en
une analyse textuelle réalisée sur les 142 lettres de
commentaires (CL) reçues par l'IASB dans le cadre
de la consultation relative au DP. La catégorisation
de l'IASB (2010b) n'étant pas reproductible, nos
catégories sont :
Les entreprises directement impliquées dans les
industries extractives (39 lettres) telles que le gaz, le
trole, les diamants, les minéraux, etc., en tant que
groupe auquel la norme est adressée, cette
catégorie sectorielle est spécifique à notre
recherche ;
Les organisations non gouvernementales (29
lettres) axées sur le plaidoyer humanitaire, religieux,
social ou environnemental ; commune à l'IASB
(2010b) cette catégorie contient les porteurs du
message ;
Les normalisateurs et les régulateurs (28 lettres),
contenant les représentants des organismes
comptables nationaux et professionnels ou les
régulateurs; bien que ces deux catégories soient
rarement fusionnées dans d'autres recherches
(Crawford, 2019) ;
Les particuliers et cabinets professionnels ou
associations (16 lettres), y compris les consultants
ayant une expertise dans le domaine ou dans des
domaines connexes ou des particuliers, cette
catégorie est partagée avec Jorinsen et al. (2012) et
Gaümann et Dobler (2019) ;
Les fonds (10 lettres), comprenant des
investisseurs institutionnels et des gestionnaires
d'actifs, la plupart d'entre eux, mais pas tous,
suivent des politiques d'investissement
responsable, bien que certains d'entre eux, comme
Calvert, aient officiellement adop les principes
pour l'investissement responsable après la
publication du DP ; il est probablement similaire à la
catégorie Investisseurs / analystes / utilisateurs de
l'IASB (2010b) ;
• Les cabinets d'audit / comptabilité (8 lettres), Big
Four et autres cabinets d'audit ; similaire à la
catégorisation de l'EFRAG (EFRAG, 2019) mais
absente de celle de l'IASB (2010b) ;
Les lobbyistes et associations (8 lettres) : groupes
autres que les ONG, impliqués dans des questions
politiques et / ou professionnelles directement ou
indirectement liées au domaine des industries
extractives, et dont la plupart sont des associations.
Cette catégorie adope par l'EFRAG (2019) ou
Jorissen et al. (2012) et nommée « lobbyistes
cachés » par Hansen, (2011) ;
Les institutions internationales (4 lettres) : y
compris la Banque mondiale, le Groupe consultatif
pour l'information financière en Europe (EFRAG), la
Fédération des comptables euroens (FEA),
l'Organisation internationale des commissions de
valeurs (OICV); cette catégorie, singulière et petite,
fait plut office de catégorie par défaut.
4.3 Résultats : les statistiques descriptives
Les lettres de commentaires ont été recueillies,
imprimées et lues de manière préliminaire. Seize
d’entre elles n'incluaient pas de réponse à la
question 10 (8 appartenaient à la catégorie des
consultants individuels et professionnels, 1 aux
groupes de pression, 2 aux régulateurs nationaux et
5 aux entreprises). Il restait 126 réponses à analyser,
2 étant quasi-identiques. La méthodologie de
recherche comportait un risque de subjectivité que
nous avons atténué en impliquant trois lecteurs
dans le projet. Nos résultats descriptifs affichent la
position générale des répondants grous par
catégorie (tableau 2), soit en valeurs absolues
gauche du tableau), soit en proportion de chaque
catégorie dans une classe de réponse (à droite). Les
commentaires ont été identifiés comme favorables
(Oui) ou opposés (Non) à la proposition de la
question 10. Ils pouvaient également exprimer des
positions conditionnelles (cond.), ou aucune (NA).
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
19 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
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20 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
Tableau 2 : Positions affirmées des répondants dans leur lettre de commentaire
Réponses en valeur absolue
(1)
(2)
Non
(3)
Oui
(4)
Cond.
(5)
NA
(6)
Non
(7)
Oui
(8)
Cond.
(9)
NA
(10)
39
Compagnies- comp
4
2
33
36%*
0%
17%
37%
29
ONGs -ngo
14
2
13
0%
47%
17%
15%
28
Régulateurs - reg
4
4
4
16
36%
13%
34%
18%
16
Individus, associations, etc.-
indiv
1
2
1
12
9%
7%
8%
13%
10
Fonds
6
4
0%
20%
0%
5%
8
Lobbys- lob
1
7
0%
3%
0%
7%
8
Auditeurs - aud
2
2
2
2
18%
7%
17%
2%
4
Institutions Internationales -ii
1
1
2
0%
3%
8%
2%
142
Total
11
30
12
89
8%**
21%
8%
63%
Non : opposition à la proposition de la Question 10 ; Oui : favorable à la proposition ; Cond :ponse conditionnelle ; NA : absence de réponse ou absence
d’expression dune position claire.
(1) : nombre de répondants dans la catégorie ; (2) : catégories de répondants ; (3) : nombre de répondants en défaveur de la proposition ; (4) : nombre
de répondants en défaveur de la proposition ; (5) : nombre de répondants posant une condition à l’approbation de la proposition ; (6) : nombre de
répondants ne se prononçant pas ; (7 à 10) : proportion des réponses dans une colonne (*ex: 36% = 4/11).
Ligne du bas - colonnes 3 à 6 : total des répondants exprimant le même avis.
Colonnes 7 à 10 : proportion de la réponse dans la population totale (**ex: 8% = 11/142).
Les résultats montrent que les participants
s’opposent rarement à un récit tel que celui proposé
par PWYP, mais leurs réponses demeurent vagues :
89 répondants n'offrent pas de réponse claire à la
question 10 et emploient le plus souvent une forme
de diversion. Par exemple, de nombreux répondants
plaident en faveur de l'initiative EITI qu'ils opposent
à PWYP (Nwete, 2007). D'autres proposent en
dernier recours de généraliser l'initiative pour
toutes les industries plutôt que de limiter l’initiative
à un secteur : «Nous ne pensons pas que l'inclusion
de ces informations soit justifiée dans le cadre
existant. Cependant, si l'IASB approfondit cette
question, il devrait élaborer un cadre et une
approche appropriés qui seraient appliqués à toutes
les industries plutôt que de se concentrer sur les
industries extractives (Lettre de Santos Ltd). »
D’autres commentateurs ajoutent des exigences,
comme l’EFRAG (European Financial Reporting
Advisory Group) qui réclame qu’un projet de
recherche soit mené afin de démontrer l’utilité
d’une telle information. L’EFRAG pose également la
question du rapport bénéfice/coût de la publication
ainsi que celle de la matériali d’une telle
information.
Les répondants de l'industrie extractive ou les
préparateurs expriment plus de scepticisme. Ils
émettent des opinions mitigées, admettant un
accord sur les objectifs généraux mais remettant en
question le rôle des normes comptables et les
besoins des utilisateurs : « Bien que nous ne soyons
pas en saccord avec le fait que les informations
sur les paiements versés aux gouvernements
pourraient être utiles aux bailleurs de fonds pour les
décisions de prêt, il semble que les besoins des
utilisateurs ne soient pas la principale motivation de
ces propositions de divulgation (Lettre de Grant
Thornton International). »
Certains commentaires (11) défendent une position
fortement opposée à l'initiative PWYP. Exxon Mobil
Corporation indique clairement que « Les normes
comptables et les informations à fournir dans les
états financiers ne doivent pas être utilisées pour
faire avancer des objectifs sociaux qui ne sont pas
liés aux principaux objectifs de l'information
financière.» Les opposants identifient les
informations extra-financières comme une
alternative aux états financiers pour divulguer une
telle information : «Pour les sociétés opérant dans
des pays ces informations peuvent être plus
pertinentes, nous suggérons qu’il peut être plus
approprié de les inclure dans un rapport de
responsabilité d'entreprise (Lettre d'Encana
Corporation). » Les opposants font valoir les coûts
supplémentaires occasions par la préparation et
l'audit des données et l’argument de confidentiali
des affaires. « La présentation d'informations pays
par pays peut être commercialement sensible et/ou
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
21 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
enfreindre les accords de confidentialité qui (…)
pourrait dans la pratique placer une entité
déclarante selon les IFRS dans une situation de
désavantage concurrentiel et ne serait donc pas
bénéfique pour les investisseurs (Lettre de Shell Int.
Ltd). »
Les ONG sont plus favorables à l'initiative de PWYP.
Elles se contentent souvent de répondre à la
question 10, ignorant les autres questions du DP,
bien qu’elles soient conseillées par des experts
(Crawford, 2019). Leur argumentation repose sur
l'objectif global d'une plus grande « transparence »
comme moyen de lutte contre la corruption, «le
document de travail propose des exemptions dans
les cas la divulgation des informations requises
pourrait nuire gravement à la position de l'enti
(paragraphe 6.37). Cela créerait une situation dans
laquelle des clauses de confidentialité au niveau
national (de la part du gouvernement ou de
l'entreprise) pourraient facilement être invoqes
pour retenir des données. Cela porterait atteinte à
l'objectif d'une norme de transparence cohérente
aux fins du renforcement de la responsabilité (Lettre
du CCFD Terre Solidaire). »
Enfin, certains fonds d’investissement plaident pour
la réconciliation des intérêts financiers avec des
questions plus éthiques: «(…) les fournisseurs de
capitaux peuvent utiliser les informations pour
éclairer les cisions d'investissement et de prêt
avec des données concernant l'exposition d'une
entité aux taux de change et à l'inflation des coûts;
les risques politiques et sociaux liés aux
changements de gouvernement, à l'expropriation
des actifs et aux troubles civils; et les risques
juridiques et réglementaires liés aux modifications
des régimes et taux d'imposition ou de redevances
et aux modifications d'autres droits et obligations
juridiques susceptibles d'affecter l'entité (Lettre de
Calvert Investment).»
Avec seulement 29% des répondants exprimant une
attitude claire vis-à-vis de la question 10, le cas
illustre les limites des techniques de mesure du
succès du lobbying via la comptabilisation des
positions pour ou contre. Le codage binaire Oui/Non
s’avère trop restrictif pour saisir la position des
répondants. Cela justifie un examen plus approfondi
du contenu des lettres de commentaires.
4.4 Méthodologie pour une analyse
approfondie d’une action de lobbying
grassroots
4.4.1 Une analyse en plusieurs étapes de la
diffusion des éléments langagiers
Le langage opère comme un moyen d’engagement
dans des relations interindividuelles et l’adoption
d'un langage similaire à un interlocuteur signale
l'adoption de ses idées (Bonnafous & Tournier, 1995
; Glady & Leimdorfer, 2015 ; Habermas 1987 ;
Scholz, 2019, p. 127). Nous suivons Cooper (1993) et
Stolowy et al. (2019) et nommons ce phénomène
« résonnance ». Les recherches sur le sujet
emploient la lexicométrie et comparent les
fréquences associées aux termes issus d’une
communication afin d’en révéler le sens. L’approche
empruntée aux écoles de l’Analyse Critique du
Discours (Fairclough, 2004) et de la Linguistique
Critique, inspirée par l’École de Francfort et
Habermas (Wodak, 2004), consiste à « cumuler,
confronter, réunir ou opposer des occurrences de
formes textuelles » (Bonnafous & Tournier, 1995,
p.69). Plusieurs postulats de lexicométrie
soutiennent la quête de sens poursuivie : i) la
comparaison des fréquences des mots répondant à
une même communication procure du sens aux
similitudes et aux différences observées dans les
textes, ii) les fréquences révèlent l’identité du texte
et les thèmes discursifs et idéologies contenues
dans un discours, iii) les fréquences révèlent aussi
des stratégies discursives, et enfin, iv) « tout
ensemble de formes mantiquement convergentes
porte la signification de cette convergence
(Bonnafous & Tournier, 1995, p.75 ). »
La lexicométrie a déjà été employée dans la
littérature en sciences de gestion. Un premier
exemple se situe dans un contexte similaire, Blanc
et Huault (2010) ont analysé les positions des
participants à un débat réglementaire lié aux droits
d'auteur et mis en évidence la reproduction d'un
ordre institutionnel. Dans la lignée de ces travaux,
nous postulons que l’usage d’un lexique similaire à
celui employé par PWYP et en réponse à la question
dite de PWYP signale la convergence des vues et une
attitude favorable à la proposition de PWYP.
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
22 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
Un second exemple est celui de Stenka et Jaworska
(2019) qui analysent les choix linguistiques dans le
cadre du due-process de l’IASB. Leur travail se
difrencie du nôtre en plusieurs points : 1) il porte
sur un temps discontinu alors que nous retenons
une unité de temps continue et bornée, celui de
l’ouverture aux commentaires du DP, 2) il se focalise
sur le terme « user » (utilisateur) pour identifier des
collocations de mots en tant que source de sens
alors que notre choix se porte sur un dictionnaire de
termes, 3) le contexte étudié comprend de multiples
émetteurs alors que dans notre cas, il n’y en a qu’un.
Enfin, l’analyse critique de discours a
précédemment été appliquée au processus de
normalisation des activités extractives (Cortese et
al., 2010). Notre travail diffère toutefois sur au
moins trois aspects: (1) notre analyse est plus
systématique alors que la leur se concentre sur trois
lobbyistes; (2) nous étudions le DP en 2010, tandis
que Cortese et al. ont étudié les commentaires à la
proposition de norme IFRS 6 en 2004 qui précéda le
DP ; (3) la question 10 est un événement unique,
absent de la norme de 2004.
4.4.2 Une méthodologie mixte
Notre méthodologie combine trois outils
généralement mobilisés indépendamment :
l'analyse textuelle, l'analyse en composantes
principales et la modélisation basée sur la théorie
des graphiques (Figure 1).
La lexicométrie permet de collecter des données
quantitatives relatives à la fréquence des mots.
L’analyse en composantes principales peut alors
utiliser ces données afin d’examiner les proximités
et les distances entre les individus. Nous nommons
« alignements » les cas où les répondants emploient
un langage significativement similaire, et « non-
alignements » les cas contraires. Enfin, nous
énumérerons ces cas pour produire une matrice
d’alignements et une matrice de non-alignements
que l’application de la théorie des graphes nous
permet de visualiser sous forme de réseau.
Figure 1 : Une méthodologie d’analyse à trois
niveaux pour une meilleure compréhension des
points de vue des répondants
La lexicométrie ou analyse textuelle
Nous utilisons NVivo pour traiter les lettres de
commentaire et produire les mesures de fréquences
de l’utilisation des termes. Les lettres de
commentaire sont léchargées sur le site de l’IASB
ainsi que le chapitre 6 et la question 10. L’analyse
textuelle réclame quelques précautions, comme
l’exclusion de la reformulation de la question 10. Le
résultat obtenu est un ensemble de fréquences
associées à des termes, pour chaque catégorie
d’individus, illustré par tableau 3.
Tableau 3 : Un exemple de l’analyse du contenu, le comptage des mots concernant la notion de transparence
Nb. de
références
Couverture
si
confid
trans
mat
rep
cor
acc
auditeurs
1
0,13%
0,0019
0,0000
0,0013
0,0012
0,0000
0,0000
0,0000
fonds
25
0,48%
0,0039
0,0000
0,0048
0,0047
0,0026
0,0022
0,0000
individus
7
0,62%
0,0048
0,0031
0,0062
0,0020
0,0025
0,0013
0,0000
institutions
internationales
2
0,19%
0,0060
0,0000
0,0019
0,0068
0,0048
0,0008
0,0000
lobbys
15
0,40%
0,0049
0,0027
0,0040
0,0091
0,0042
0,0009
0,0006
régulateur
21
0,56%
0,0045
0,0007
0,0056
0,0040
0,0003
0,0002
0,0016
ONG
134
0,66%
0,0040
0,0013
0,0066
0,0046
0,0020
0,0028
0,0012
PWYP
2
0,06%
0,0030
0,0022
0,0006
0,0044
0,0040
0,0014
0,0000
compagnies
32
0,76%
0,0032
0,0029
0,0076
0,0035
0,0000
0,0009
0,0014
(Si) : Shareholders / investors - (Confid) : Confidentiality - (Trans) : Transparency - (Mat) : Materiality - (Rep) : Reputation - (Cor) : Corruption - (Acc) : Accountability.
Les résultats indiquent la fréquence relative des mots relativement à l’ensemble du texte de réponse à la question n°10.
ANALYSE
TEXTUELLE
Fréquence des
termes
ANALYSE EN
COMPOSANTES
PRINCIPALES
Proximité et
éloignement
des individus THEORIE
DES
GRAPHES
Matrice
d'alignements
& non-
alignements /
sociogrammes
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
23 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
Une analyse en composantes principales des
fréquences des termes sémantiques
Les résultats de notre analyse lexicométrique
constituent un ensemble complet de données. En
effet, en l’absence de fréquence associée à un terme
dans une catégorie, nous lui avons substitué 0 %. La
condition de complétude des dones étant
validée, il est possible de réaliser une analyse en
composantes principales (ACP - Benzécri, 1981,
1992 ; Beaudouin, 2016). Il s’agit d’une thode
d’analyse de données visant à réduire la
dimensionnalité en projetant des résultats sur un
espace de moindre dimension, tout en préservant le
plus de dispersion possible. Le résultat est une
représentation géométrique sur un plan. Les
projections capturent ainsi la plus large quantité
d’information pertinente au regard des données
d’origine. Les composantes principales sont des
droites indiquant les directions maximisant la
variance de la donnée projetée. Le Tableau 4 illustre
les résultats d’une ACP à sept variables avec la
proportion de variance expliquée par chaque
facteur (composante), leurs valeurs propres et la
contribution de chaque variable à la définition de la
composante. Dans notre illustration, la première
composante explique 36% de la variance globale,
tandis que les deuxième et troisième en expliquent
respectivement 29% et 15%. L'étude des trois
premiers axes nous permet de capter environ 80%
de la dispersion, et de vérifier les critères de Kaiser.
Par conséquent, nous n'avons pas examiné les plans
impliquant les composantes ayant une valeur
propre inférieure à 1.
Tableau 4 : Caractéristiques de l’analyse en composantes principales dans le test 1
Comp.1
Comp.2
Comp.3
Comp.4
Comp.5
Comp.6
Comp.7
Écart type
1.58
1.42
1.01
0.93
0.69
0.33
0.04
Proportion de Variance
0.36
0.29
0.15
0.12
0.069
0.01
0.00
Proportion cumuler
0.36
0.65
0.79
0.91
0.98
0.99
1.00
Eigenvalues
2.52
2.01
1.02
0.86
0.48
0.11
0.00
Contribution des variables aux facteurs
Shareholders/ investors
-0.409
-0.360
-0.323
0.136
0.627
0.248
0.355
confidential
-0.383
0.235
-0.862
0.207
transparency
0.300
-0.577
0.136
0.326
-0.505
-0.435
materiality
-0.474
-0.287
-0.311
-0.543
-0.514
0.191
reputation
-0.616
0.137
-0.129
0.267
-0.715
corruption
-0.138
-0.310
0.757
0.422
-0.187
0.160
0.273
accountability
0.341
-0.458
-0.381
0.156
-0.411
0.561
-0.143
Une visualisation par la théorie des graphes
Le tableau 4 illustre 7 termes retenus pour notre
première ACP. Nous en conduisons 4 autres selon la
même méthodologie et en testant les 32 termes
porteurs de concepts les utilisés dans les lettres de
commentaire. Les résultats des ACP indiquent la
contribution des termes aux composantes, nous
conservons les seuls résultats significatifs
(surieurs à [0,5]) et réduisons ainsi la dimension
de nos données. Sur cette base, la troisième étape
de notre méthodologie peut répondre à la demande
de Habermas (2006) qui requière la construction
d'un «agrégat mesuré d'attitudes pour ou contre des
questions publiques controversées telles qu'elles
prennent forme tacitement au sein de publics faibles
(…) influencés par les discussions quotidiennes dans
les cadres informels ou les publics épisodiques de la
société civile. »
Pour construire cet agrégat, nous avons compté,
manuellement, les alignements et les non-
alignements intercagoriels indiqués par les
résultats de nos 5 ACP. Les résultats agrégés sont
rapportés dans une matrice (Figure 2) : le
nombrement des alignements figure en-dessous
de la diagonale, et celui des non-alignements est
lisible au-dessus. La visualisation de ce résultat est
possible grâce à la théorie des graphes. Les graphes
sont construits à partir du nombrement des
alignements et non-alignements, séparément
(Figure 3). Ils rendent compte de la force du lien
entre deux sommets, chacun représentant une
catégorie de répondants. La matrice d'alignements
forme un réseau de coalitions liées positivement
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
24 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
tandis que la matrice de non-alignements forme un
réseau de coalitions liées négativement.
La visualisation prend la forme d’un sociogramme.
Cet outil est employé depuis 1933, et construit à
partir des interactions exprimées par des
participants à un échange. Les sociogrammes de
Moreno (1934) sont reconnus comme les premiers
« réseaux sociaux cartographiant les affinités
sociales d’un groupe d’individus (Grandjean, 2015a,
2015b). » Ils permettent d’analyser la dynamique de
groupe en élicitant les relations sociales exprimées
par des attitudes ou des opinions. Leur analyse
permet de caractériser le statut sociométrique de
l’individu (meneur, puissant ou populaire, éminence
grise ou isolé). Elle produit également des clés
permettant d’influencer le comportement des
participants. Notablement, nos sociogrammes sont
produits selon une approche scientifique, duplicable
et vérifiable.
reg
pwyp
aud
comp
funds
ngo
indiv
ii
lob
total
alignements
total non-
alignements
valence
alignements
valence non-
alignements
Régulateurs ou normalisateurs
5
0
0
5
4
0
1
6
13
21
6
5
PWYP
1
2
4
2
2
1
4
3
19
23
8
8
Auditeurs
1
3
0
3
2
1
3
5
5
16
3
6
Compagnies
4
1
0
1
1
0
5
3
9
14
4
5
Fonds d’investissements
0
2
0
0
0
1
3
0
10
15
3
6
ONG
2
1
0
3
3
2
6
2
14
19
5
7
Individus
2
1
1
1
0
0
1
3
6
9
5
6
Institutions internationales
3
6
0
0
0
0
1
3
16
26
4
8
Lobbyistes
0
4
0
0
5
5
0
6
20
25
4
7
Somme
112
168
42
58
reg : Régulateurs ou normalisateurs ; pwyp : PWYP ; aud : auditeurs, comp: compagnies ; fund: fonds d’investissement ; ngo: ONG ; Indiv: individus ;
ii : Institutions internationales ; Lob: lobbyistes.
Figure 2 : Matrice des alignements/accords(en-dessous de la diagonale) et des non-alignements /désaccords
(au-dessus de la diagonale) matrice
Figure 3 seaux d’alignements et de non-alignements
Les lignes représentent les nombres de concepts sujets à alignement/non alignement
Les réseaux sociaux représentent des relations
susceptibles de s’établir à divers niveaux : micro
(individuel ou organisationnel), méso (au niveau
sectoriel) ou macro (global). Selon Hedström et al.
(2000), un réseau de niveau méso soit le niveau
ici étud reliant directement les adoptants
antérieurs et potentiels d'une pratique les uns aux
autres, diffère à trois égards des réseaux
interpersonnels (de micro-niveau). Premièrement,
le réseau méso est généré par un processus causal
difrent de celui du réseau de niveau micro.
Autrement dit, les liens qui unissent les répondants
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
25 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
d’une catégorie diffèrent des liens unissant des
individus. Deuxièmement, il a tendance à être
beaucoup plus clairsemé que le seau à micro-
niveau, c’est-à-dire que la densité relationnelle y est
en moyenne plus faible. Troisièmement, le lien
typique (arc) d'un réseau de niveau méso relie des
distances sociométriques et géographiques bien
plus longues que le lien/arc typique d'un réseau à
micro-niveau. Par exemple, les liens existants entre
des individus sont géographiquement plus courts
que ceux unissant les entreprises appartenant à un
même secteur. Selon Luhmann (1997), les réseaux
de niveau intermédiaire disposeraient d’un intérêt
particulier car ils peuvent considérablement
influencer la vitesse à laquelle une pratique
(contagieuse) se diffusera. Alors que nous
cherchons à étudier la résonnance, c’est-dire le
résultat d’un processus de diffusion (ou de
contagion linguistique) d’une idée exprimée par une
sémantique spécifique, l’analyse d’un réseau de
niveau méso semble donc appropriée.
L’application de la théorie des graphes (Berge, 1958,
1969) offre une visualisation du réseau (Figure 3).
Les catégories d’individus forment les sommets du
réseau, la force des relations est capturée dans
l’épaisseur et la continui du trait. La forme de l’arc
est associée au nombre de relations alignées
(légende en haut des graphes). Dans notre exemple,
seuls les couples « institutions internationales et
PWYP » et « institutions internationales et
lobbyistes » se caractérisent par une relation forte,
comprenant au moins six points d’accord. Les autres
relations d’alignement sont toutes plus faibles. La
matrice de non-alignements (à droite) indique deux
relations comportant 6 non-alignements :
« lobbyistes et régulateurs » et « institutions
internationales et ONG ».
5. INTERPRETATION DES RESULTATS
5.1 Une analyse approfondie des résultats
L’analyse lexicométrique préconisée à la fois par la
théorie de l’action communicationnelle et par
l’école de la linguistique critique, influencée par la
première, s’avère fructueuse mais incomplète. Elle
est fructueuse car elle permet de mettre en lumière
des jeux d’alignements et de non-alignements dans
des systèmes multi-agents (Moutaoakil et Jamouli,
2014). Toutefois, en se focalisant sur les éléments
exprimés, l’analyse lexicométrique demeure
incomplète, car elle ne s’intéresse qu’aux éléments
communicationnels visibles et ne traite pas de
l’absence d’accords sémantiques ou de l’absence de
saccords, en tant qu’éléments immatériels
favorisant la poursuite ulrieure d’un dialogue.
L’élicitation des positions des participants via leurs
choix sémantiques
Couplée à l’analyse en composantes principales,
l’analyse lexicométrique montre une nette
opposition dans les choix sémantiques, notamment
entre corruption et transparence (Tableaux 2, 3 et
4). Alors que la plupart des catégories de
répondants mentionnent la « transparence » plus
fréquemment que la « corruption », celle-ci
apparaît comme une préoccupation convergente
pour PWYP, les fonds d’investissement, et les ONG.
Ceci indique que six fonds dinvestissement
répondants adoptent le vocabulaire proposé par
l’initiative PWYP. Au moment de la consultation, ces
six fonds sont signataires des Principes
d’Investissement Responsable, plaidant en faveur
d’une information ESG (Environnementale Sociale
et de Gouvernance) la corruption apparaît en
te des thèmes de Gouvernance
(https://www.unpri.org) Deux autres fonds les
rejoignent fin 2010 et 2012. Les deux autres - F&C
Management, un fond britannique, et Norges Bank
Investment Management - ne figurent pas sur la
liste des signataires en 2023. Nos résultats (voir par
exemple le Tableau 3 et la Figure 2) révèlent en
outre la position isolée des cabinets d'audit, qui
n’est pas due à l’usage d’un jargon mais à la
mobilisation de concepts différents des
préoccupations des autres catégories. Il est
envisageable que les auditeurs mettent en avant
des termes associables à des offres de services.
Des outils concrets au service de la théorie de
l’action de communication d’Habermas
Notre analyse révèle un fait remarquable : il existe
un excès de non-alignements sémantiques par
rapport aux alignements sémantiques (Figure 3) ; Ce
fait est visible par la densité plus importante du
graphe des non-alignments et en calculant le
nombre total dalignements (112) versus celui des
non-alignements (168), ce qui résulte en un surplus
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
26 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
de 50%. De plus, la valence c’est-à-dire le nombre
d'arêtes incidentes à un sommet est plus élevée
de près de 40% dans la matrice de non-alignements
(58) qu'elle ne l'est dans celle des alignements (42) .
Enfin, l'incidence la force ou le nombre de
relations entre deux sommets qui est capturée
dans l'épaisseur des arêtes, est plus importante
dans la matrice de non-alignements que dans celle
d'alignements. L’on compte en moyenne 12,4
alignements par catégorie, contre 18,7 non-
alignements. Le cas illustre une situation dans
laquelle une stratégie de réseau peut contribuer à
faire face à des risques significatifs (Aliout et al.,
2015), dans le cas étudié, les désaccords avec les
autres catégories sont non seulement plus
nombreux que les accords, et en moyenne, ils le
sont sur un plus grand nombre de sujets. Ce
séquilibre entrave les chances d’acceptation du
plaidoyer car le nombre de compromis à consentir
peut apparaître trop important. Ce seul fait pourrait
expliquer les difficuls rencontrées par l'IASB au
cours des trois dernières décennies dans sa
tentative d'élaborer une norme dédiée aux activités
extractives. D’un point de vue théorique, l’examen
des accords et désaccords sémantiques complète la
théorie de l’action de communication en identifiant
un frein concret à l’atteinte du consensus recherché
par Habermas (1987) : le déséquilibre des positions.
Toutefois, les leçons tirées de lanalyse des graphes
peuvent en faire un frein transitoire si elles
permettent de mettre en œuvre une stratégie dans
la poursuite du dialogue. Le cas illustre le fait qu’en
matière de lobbying grassroots, la relation se
construit de manière progressive, dans le temps.
Une stratégie peut consister à identifier les sous-
graphes présents dans un graphe. Les sommets
caractérisés par les incidences et les valences les
plus élevées peuvent former un sous-graphe
exclusivement composé d'alignements forts. Dans
notre cas, cela impliquerait des entreprises, des
régulateurs et la catégorie regroupant les
particuliers, les cabinets professionnels et les
associations. Il s’agit des individus les plus
susceptibles de parvenir à un consensus, mais aussi
les plus alignés sur les autres catégories de
répondants. Elles constituent un relai de choix pour
poursuivre la diffusion du plaidoyer.
La comparaison entre les deux graphiques de la
Figure 3 est également riche denseignements. Les
alignements intercatégoriels peuvent être à la fois
aussi forts, plus faibles ou plus forts que les non-
alignements, ou absents. Il devient alors possible de
former une troisième matrice que l’on nommera
matrice différentielle, non illustrée ici. Nous l’avons
toutefois calculée. Il en ressort que trois catégories
de répondants montrent une difrence positive
importante entre les non-alignements et les
alignements : les régulateurs, les auditeurs et les
institutions internationales. Cela suggère que
l'atteinte d'un consensus ou d'un compromis
cessitera plus d'efforts de leur part car de
nombreux désaccords devront être résolus avant
qu'un meilleur alignement ne soit possible. En cela,
la théorie de communication se dote d’un outil
concret de détection des freins à l’établissement
d’un consensus.
Enfin, la théorie de l’action de communication
s’intéresse avant tout à ce qui est exprimé via le
langage. Habermas consacre l’héroïsme de la
maïeutique et traite le silence comme une
échappatoire qu’il convient de soustraire au
protagoniste du dialogue (Jaffro, 2011). Néanmoins,
ce qui n’est pas visible peut également revêtir de
l’importance et se révéler utile pour maintenir une
relation. Sachant qu’une matrice de non-
alignements ne peut être comprise comme l'inverse
de la matrice d'alignements, lexploration des non-
accords, qui se concentrent sur les domaines où
l'accord n'existe pas encore, ou des non-désaccords,
qui se concentrent sur les domaines les
saccords n'existent pas peut révéler la richesse du
vide. Dans le cas étudié, nous avions retenu les 32
termes les plus cités par les catégories de
répondants. Or, nous observons un maximum de 6
accords ou désaccords, il subsiste donc un minimum
de 26 espaces laissés vacants et autant de « zones
de friches » dialogiques dont l’évolution au cours
d’un plaidoyer pourrait faire lobjet de recherches
futures. Contrairement à la théorie du langage
d’Habermas, le déploiement de l’intersubjectivité
ne serait alors pas conditionnelle à l’usage du
dialogue.
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
27 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
5.2 Une contribution théorique à
développer : le processus
d’institutionnalisation d’un plaidoyer
Néanmoins, en bien des points, le cas illustre la mise
en œuvre d’un dialogue et le rôle de plateforme de
diffusion des idées joué par le due-process
comptable. Il semble témoigner d'une
sensibilisation en cours selon la trilogie identifiée
par Crawford (2019) : en effet, en 2010, PWYP avait
réussi à "innover" en disposant d’un chapitre dédié
dans une proposition de norme, et à "diffuser" en
ayant accès au « due-process » mais en revanche,
elle n’est pas encore parvenue à "instituer" sa
proposition d’inscription des paiements faits aux
gouvernements dans une communication
organisationnelle obligatoire. Toutefois, ce
processus d’institutionnalisation, s’il n’existe pas
encore dans la fenêtre observée, va poursuivre son
veloppement.
Le dialogue menant au compromis plutôt qu’au
consensus
Si le résultat n’a pas immédiatement abouti durant
la période de commentaire, cette initiative inaugure
anmoins un processus d’intercompréhension tel
que décrit par Habermas (2006) en ce qu’elle
construit, renforce et clarifie les relations
interpersonnelles et pose les jalons dun consensus.
En engageant une relation interpersonnelle par le
biais du langage, les ONG, avec l’aide de l’IASB, ont
visé «un accord qui remplit les conditions d'un
consentement motivé rationnellement, concernant
le contenu d'une expression » et sont parvenu à
diffuser leurs idées.
Cela s’illustre notamment par l’évolution de la
relation intercatégorielle reliant les ONG et les
institutions. Dans la fenêtre temporelle examinée,
cette relation se distingue comme étant la plus
fréquemment non-alige. Si la simple lecture des
expressions de leurs positions respectives n'a pas
révé ce fait, car les institutions internationales
n'ont pas pronon de position claire, notre
méthodologie rend visibles des choix mantiques
discriminants. Nous assistons anmoins à un
processus de gain d'influence qui est sur le point de
se transformer en ce qui a peut-être été l'évolution
la plus importante du reporting des entreprises,
avec l'avènement du reporting extra-financier ou de
durabilité et avec une série de réglementations qui
ont depuis vu le jour. Ces réglementations prouvent
l’atteinte progressive d’un consensus politique, en
pit de quelques errances. Ils contredisent les
propos d’Habermas qui jugeait la société civile en
position faible. Les dispositions présentes dans les
réglementations succinctement présentées dans les
prochains paragraphes suggèrent une position forte
de la société civile.
Vers un consensus international en matière de
réglementation
En Europe, deux directives publiées après 2010
abordent la question des paiements aux
gouvernements. La première est la directive
comptable de l'UE (EU/2013/34) qui comprend un
chapitre 10 Rapport sur les paiements aux
gouvernements (art. 41-48) , et la directive
2014/95/UE, qui modifie cette dernière, sans
ajouter d'exigences supplémentaires. La seconde
est la directive sur la transparence qui requiert, à
l'article 6, un rapport sur les paiements aux
gouvernements (EU / 2013/50 (7-8) - 2004/109 / CE
(14)).
Au Canada, la Loi sur les mesures de transparence
dans le secteur extractif (ESTMA, art. 9-2) est en
vigueur depuis 2015, avec un seuil de déclaration
comparable au seuil européen, à 100 000 $ au lieu
de 100 000 €.
Aux États-Unis, la section 1504 Dodd-Frank Wall
Street Reform and Consumer a été émise, mais le
président Trump a souhaité l'abroger avec le projet
de loi HR 4519, le 14 février 2017. Une proposition,
la gle 13 (q) a ensuite été ouverte aux
commentaires. Depuis le 16 décembre 2020, la SEC
a adop une nouvelle règle de divulgation des
paiements faits aux gouvernements dans les
sections 13(q) et 15(d)
(https://www.sec.gov/files/rules/final/2020/34-
90679.pdf). Celle-ci tient compte des motifs
d’invalidation pointés en 2017 et prévoit quelques
aménagements : 1) elle contient deux exemptions
conditionnelles pour les situations dans lesquelles
une loi étrangère ou un précontrat existant interdit
la divulgation requise ; 2) elle exempte les petites
sociétés déclarantes et les sociétés à croissance
émergente ; 3) elle révise la définition de «
contrôle» pour exclure les entités ou opérations
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
28 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
dans lesquelles un émetteur a un intérêt
proportionnel (SEC, 2020).
Le cas illustre la force du dialogue : il sert à la fois à
construire une uniformisation des lois
internationales mais il offre également une
plateforme accessible à d’autres parties prenantes
exprimant leurs propres exigences. Le dialogue sert
alors un compromis plutôt quun consensus tel que
préconisé par Habermas (1987).
L’observation rétrospective de l’initiative de PWYP
suggère que leur revendication peut avoir été
depuis sa création au cœur d'une action
stratégique et non d’une action de communication
(Habermas, 1987). Loin de la conception
Habermassienne, les actions de communication
s’avèrent stratégiques de par les plateformes
ciblées. Ainsi, en visant apparemment le
normalisateur comptable, PWYP a atteint les
institutions internationales, et en pit des
divergences dont témoigne le processus de
concertation, le plaidoyer de PWYP a trouvé dans le
due-process une plateforme de diffusion des idées
et a créé les conditions d’un consentement plus
tardif. Cependant, comme l'a souligné Crawford
(2019), si PWYP a fait preuve d'agilité dans sa
tactique, son succès institutionnel pourrait
davantage être aux préoccupations
environnementales et à une forme de consternation
vis-à-vis des superprofits des compagnies
trolières.
La transformation de la normalisation comptable
Ces événements inaugurent anmoins une
nouvelle ère dans le champ comptable. Jusqu'alors,
la normalisation comptable était un domaine dans
lequel les experts travaillaient sur des questions
techniques peu liées aux débats politiques et
sociaux. Les autorités compétentes (représentants
de l'industrie, commissaires aux comptes,
ministères des Finances…) y conservaient le
monopole des propositions (Noël et al., 2010) et
imposaient leur langage technique. Or, le cas illustre
une transformation du processus de normalisation
dans un domaine où les intérêts publics et privés se
confondent. Ce qui peut également être compris
comme une condition de gitimité car « l'IASB, en
tant qu'institution, doit être acceptée pour
survivre » (Gallhofer et al. 2011). Ainsi dans son
document de travail de 2010 (DP), l’IASB moigne
d'un développement processuel en faveur d’une
pratique comptable émancipatrice (Crawford,
2019).
Conformément à la théorie de l'accès, issue de la
perspective de la dépendance aux ressources
(Pfeffer & Salancik, 1978), le cas illustre le besoin
des décideurs politiques en ressources, sous forme
d'expertise, d'informations ou de retours aux
gouvernements (Kourtikakis, 2021) et en
provenance des parties cherchant à obtenir un
accès et une influence (Arras & Beyers, 2020). Le lien
relationnel établi au cours du processus de
concertation n’est autre qu’une relation d'échange
entre acteurs privés et publics (Bouwen, 2002a, p.7)
caractérisée par l’apport d’une nouvel ensemble
lexical propre à susciter le consensus mais aussi par
l’avènement d’une plateforme propre à faire
émerger des couplages institutionnels plus formels
(Luhmann, 1992). La situation suggère en outre que
des signaux faibles de changements institutionnels
peuvent être retracés dans une analyse textuelle
approfondie des discours et des commentaires.
Vers une conception renouvelée du lobbying, le cas du
grassroots
Enfin, au-delà de la distinction entre lobbying
grasstop et grassroots présentée en section 3, notre
travail contribue également à la littérature sur le
lobbying. Nous sommes loin de représenter un
processus classique de lobbying une coalition
dominante d'industriels impose son agenda au
régulateur. Notre travail met en évidence une
caractéristique importante du lobbying que la
littérature existante, centrée sur le résultat du
lobbying (Sutton, 1984), n'a pas soulige : le mode
d'action du lobbying, dans sa forme grassroots,
repose sur un réseau dynamique de relations
interdépendantes entre les parties prenantes d'un
système, et éventuellement favorisé par des
institutions en demande de ressources
intellectuelles. Dans ce réseau, les nœuds incarnant
les parties prenantes sous-tendent le réseau
intégré. Entre les nœuds, des canaux de diffusion du
plaidoyer et d'influence assurent le caractère
V. Blum, N.-T. Le, B. Gumb
29 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
dynamique et évolutif du réseau. Il en ressort une
interprétation de l’activité de lobbying comme un
ensemble d’actions exercées sur l'équilibre d'un
système afin d'obtenir une forme suffisamment
favorable au lobbyiste. Les nœuds qu’il convient de
celer agissent comme des points de gravité du
système et les porteurs du plaidoyer doivent veiller
à ce que les alignements en direction du lobbyiste
passent les désalignements. Il convient en outre
d’anticiper et de prévenir les ruptures de ces
relations (arcs), car la création d« îlots nodaux »
indépendants pourraient constituer le principal
risque d'une opération de lobbying, en ce qu’ils
rendraient le réseau partiellement ou totalement
inerte. Un remède à cela consiste à assurer une
valence élevée pour chaque sommet, en multipliant
les actions communicationnelles tout en veillant à
scrupuleusement entretenir le réseau de parties
prenantes dont les intérêts restent interconnectés.
Au contraire, le lobbying direct est obtenu au
triment de l'équilibre du réseau car la
communication en provenance du lobbyiste ne
s’adresse qu’aux décideurs et revêt, par nature, un
caractère asymétrique. Il s'ensuit que le lobbying
grassroots dans un cadre multi-acteurs peut être
fini comme un art d'accéder et de préserver un
réseau tout en maintenant un équilibre favorable en
son sein.
6. CONCLUSION
Le présent travail a propoune analyse du contenu
des lettres de commentaire sur le projet de
règlement comptable pour la transparence dans le
cadre du document de travail 2010/01 pour une
norme relative aux activis extractives. Il s’agissait
d’un cas original le normalisateur international,
l’IASB, a relayé une question proposée par une
coalition d’ONG PWYP lui offrant ainsi une
plateforme de diffusion de son plaidoyer. Pour
analyser la résonance ainsi obtenue par le plaidoyer,
nous avons employé une méthodologie combinant
une analyse textuelle lexicométrique, une analyse
en composantes principales et une modélisation
basée sur la théorie des graphes. Le résultat peut
être visualisé sous la forme de matrices
d'alignements et de non-alignements.
Le cas relate un changement historique lié à
l'implication sans précédent des ONG dans le
processus de normalisation comptable. Alors que
d'autres recherches ont mis en évidence le rôle
d’« acteurs puissants» dans leurs activités de
lobbying direct, nous esquissons un contexte plus
dynamique des participants inattendus prennent
en charge des enjeux alternatifs. L'implication des
ONG témoigne d'une pression croissante des
consommateurs et plus généralement de la société
civile sur les régulateurs. Elle atteste d'un
changement radical des finalités des systèmes
sociétaux, et de l'émergence d'une comptabili
émancipatrice. Ses moyens pour y parvenir sont
l’instauration de relations communicationnelles en
direction des institutions internationales et via le
partage d’un langage. En cela, notre étude de cas
illustre les modalités d’action du lobbying
grassroots et sa perspective à long terme. Il convient
de noter que le normalisateur a implicitement
reconnu une extension du champ d'application de la
réglementation comptable, ouvrant la procédure de
normalisation à une proposition qui sortait
initialement de son agenda. Une nouvelle forme de
porosité réglementaire est apparue et, encore une
fois, le secteur extractif prend les devants dans ce
qui est peut-être considéré comme une innovation
comptable (Blum & Girard, 2014).
Notre recherche qualitative et mixte possède
certaines limites. La première tient à la fenêtre
temporelle choisie. Bien que nous ayons étudié un
cas de participation formelle au processus officiel
(Georgiou, 2004 ; Jorissen et al., 2011 ; Orens et al.,
2011), notre étude ne porte que sur la partie visible
(les lettres de commentaires) ; elle ignore la saisie
antérieure de la procédure régulière et la méthode
de lobbying informel en amont qui ont permis
l'insertion de la question 10 dans le document de
travail. Le présent travail a peu de valeur prédictive,
et les approches méthodologiques pourraient être
remises en cause (pour leurs typologies, pour les
modalités d'exploration etc.). Il reste difficile de
savoir, par exemple, si l'initiative PWYP a été plus
qu'une simple tentative de visibili ou un test
d'acceptation sur la base duquel les
veloppements réglementaires actuels ont pu être
construits et se poursuivront.
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
30 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
Les recherches futures pourront en outre explorer la
manière dont, dans une unité de temps plus longue
le plaidoyer se diffuse vers un plus grand nombre de
destinataires : les médias avec notamment
l’examen des contenus présents dans la presse, la
société civile et le contenu des discours
contestataires envers les activités extractives, le
champ politique et le contenu des réglementations,
et en particulier dans un avenir proche, le contenu
des normes sectorielles de durabilité proposées par
l’EFRAG et l’ISSB (International Sustainability
Standards Board).
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8. BIOGRAPHIE
Véronique Blum
Véronique Blum est Maître
de conférences HDR à
l’Université Grenoble Alpes.
Elle est responsable
scientifique de l’initiative de
Recherche MAPMONDES
bergée par la Fondation du Risque et l’Institut
Louis Bachelier. Depuis 2017, elle est membre du
panel académique de lEFRAG. Sa recherche porte
principalement sur la capture des risques dans
l’évaluation financière et non financière des actifs et
entités incertains, immatériels, stratégiques et des
difrentes formes d’impacts des activités
organisationnelles. Elle s’intéresse également au
processus de normalisation comptable, comme
c’est le cas ici.
Nhu-Tuyën Lê
Nhu-Tuyên Lê, docteur en
sciences de Gestion de HEC
Paris, est enseignant-
chercheur en comptabili à
Grenoble École de
Management. Elle est
membre du bureau du RT 30 Sociologie de la gestion
et du Comité de rédaction des Cahiers
Internationaux de Sociologie de la Gestion (CISG).
Avec une approche transversale, ses recherches
questionnent le rôle de la comptabilité et son
impact dans l'évolution des sociétés, et plus
particulièrement des nouvelles économies de
La résonnance dun plaidoyer au cours d’un processus de concertation sur une norme comptable: le cas des activités extractives
34 ©2024, Revue Française de Gestion Industrielle, Vol. 38, N°1
marché émergentes. Une bifurcation vers les
problématiques environnementales et sociales
l’oriente vers le courant de pensée de la
croissance de Georgescu-Roegen initiateur de
controverses, de débats et de nouvelles initiatives
sociétales.
Bernard Gumb
Bernard Gumb, nous a quit
le mardi 13 octobre 2015. Il
était Professeur à Grenoble
École de Management. Il
était surtout notre ami et
notre collègue. Nous avions
buté les travaux de cet article avec lui. Il a été
infiniment difficile d’apporter des modifications à
ses mots et nous remercions les différents éditeurs
et réviseurs qui nous ont aidées à poursuivre notre
ambition et notre volonté de mener ce projet à son
terme, en sa mémoire. Nous sommes très
heureuses de lui rendre hommage à l’occasion de la
publication de notre dernière collaboration. Il nous
répondrait certainement avec une de ces pirouettes
par un jeu de mots ou une contreterie. Bernard,
ou l’art en berne.
1 Véronique Blum, Université Grenoble Alpes, France,
veronique.blum@univ-grenoble-alpes.fr
https://orcid.org/0000-0003-3018-5141
2 Nhu-Tuyën , Grenoble École de Management, France,
Nhu-Tuyên.LÊ@grenoble-em.com
https://orcid.org/0000-0003-3057-2563
3 Bernard Gumb, Grenoble École de Management, France